Nous examinons en lecture définitive la proposition de loi visant à garantir le respect du droit à l'image des enfants, texte qui aurait dû aboutir à un accord en commission mixte paritaire tant il semble possible de nous accorder sur la nécessité et l'opportunité de mieux protéger nos enfants des détournements de leur image dont ils peuvent être victimes sur internet.
L'utilisation d'internet et des réseaux sociaux est en effet devenue une pratique courante, sinon banale, dans la vie quotidienne de bon nombre de nos concitoyens et concitoyennes. Partager une photo de son enfant, de ses premiers pas, de ses premiers exploits, constitue un acte très anodin pour des parents si fiers de leur chérubin. Chaque année, des millions de photographies sont ainsi publiées sur internet et les réseaux sociaux, sans d'ailleurs que les enfants qui y figurent aient consenti à leur diffusion. Dans la majorité des cas, les parents qui publient des contenus mettant en scène leur enfant ne redoutent aucune malveillance, aucun danger. Pourtant, de nombreuses personnes malintentionnées naviguent sur internet.
Si l'on ne devait retenir qu'un chiffre éloquent, en 2020, 50 % des images échangées sur les sites pédopornographiques avaient initialement été partagées par des parents qui ne s'étaient certainement jamais doutés qu'elles seraient détournées à de telles fins.
Voilà pourquoi le groupe GDR – NUPES soutient l'article 1er de la proposition de loi, article qui inscrit dans le code civil la disposition selon laquelle les parents ont pour responsabilité de protéger la vie privée de leur enfant. Publier une photo de son enfant sur internet n'est pas un acte si anodin et doit inciter les parents à la réflexion, particulièrement quand on sait que le droit à l'oubli demeure très difficile à faire appliquer.
L'article 2 poursuit le même objectif en ce qu'il dispose que les parents protègent de façon conjointe le droit à l'image de leur enfant mineur et l'associent à l'exercice de ce droit, selon son âge et son degré de maturité. Notons que la présente rédaction de cet article nous paraît plus équilibrée que sa version initiale.
Ces deux articles auront toute leur importance, mais à la condition qu'ils s'accompagnent de campagnes de sensibilisation à l'intention des parents, qui ignorent souvent ce que recouvre la notion de droit à l'image de l'enfant. J'ajoute qu'il sera aussi nécessaire de davantage les responsabiliser sur le respect de la vie privée de l'enfant dont ils ont la charge.
Les articles 3 et 4, quant à eux, ont cristallisé les désaccords entre l'Assemblée nationale et le Sénat.
L'article 3, qui permet au juge aux affaires familiales d'interdire à l'un des parents de diffuser tout contenu relatif à l'enfant sans l'autorisation de l'autre parent, ne nous pose pas de problème.
Quant à la délégation forcée de l'autorité parentale, que prévoit l'article 4, nous y sommes favorables depuis la première lecture du texte, mais à deux conditions. La première est qu'une telle décision soit prise au motif que les contenus publiés portent gravement atteinte à la dignité de l'enfant ou à son intégrité morale. La seconde est qu'elle soit prise par le juge aux affaires familiales. En définitive, une telle disposition nous semble utile et nécessaire dans certains cas exceptionnels.
Par ailleurs, à l'instar de nos collègues sénateurs, nous regrettons que la majorité ait choisi de légiférer pour protéger les enfants des écrans et des dérives d'internet au travers de plusieurs propositions de loi distinctes. Celles-ci sont pertinentes, mais n'aurait-il pas mieux valu un texte unique afin de mieux articuler l'ensemble des mesures ?
Quoi qu'il en soit, nous tenons à saluer le travail au long cours que vous avez réalisé, monsieur le rapporteur. Votre travail est d'autant plus important que le texte s'inscrit dans la continuité d'autres propositions de loi adoptées par le passé, notamment pour encadrer l'activité des enfants influenceurs, ou encore pour renforcer le contrôle parental sur les moyens d'accès à internet.