Monsieur le ministre de l'intérieur et des outre-mer, nous allons procéder à votre audition, préalable à l'examen du projet de loi pour contrôler l'immigration, améliorer l'intégration. Ce texte joufflu – et sans doute excessif – a déjà été examiné par le Sénat : certaines de ses boursouflures ne résisteront sans doute pas à l'œil juridique du Conseil constitutionnel ou à l'examen par la commission des lois. Je renvoie d'ailleurs les sceptiques et les critiques aux décisions du Conseil constitutionnel sur la loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur (LOPMI) – les ajouts sénatoriaux avaient notamment été censurés – ou, plus récemment, sur la loi d'orientation et de programmation du ministère de la justice 2023-2027 (LOPJ), dont les articles 2, 4, 8, 10 et 20 ont été considérés comme des cavaliers législatifs.
J'invite aussi chacun à constater que certains ajouts sont politiquement regrettables, s'agissant de la politique de santé publique, des mineurs non accompagnés ou du code de la nationalité française. De toute évidence, les arguments juridiques ne se suffisent pas à eux-mêmes. J'espère que la commission des lois retrouvera l'ambition initiale du Gouvernement et sa lucidité en matière d'immigration.
Comme souvent, la partie du projet de loi la plus utile aux Français sera sans doute la moins commentée : cela a été le cas pour la loi confortant le respect des principes de la République, dite loi « séparatisme », concernant la police des cultes, puisque la territorialisation et l'accélération des procédures d'asile – qui s'appliquera à près de 300 000 personnes – seront certainement étudiées dans le plus grand des consensus par cette commission. À cet égard, il serait utile que M. le ministre puisse préciser, en introduction, la liberté de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) à s'organiser, pour la formation de jugement, en juge unique ou en collégialité. La simplification des procédures – de douze à trois, voire à deux – sera également très profitable à tous les requérants ; viennent ensuite les dispositions qui ont été largement débattues avant que ne nous réunissions cette commission.
Tout d'abord, le texte comporte des mesures en matière de fermeté, et je suis curieux de savoir qui s'y opposera. Elles concernent l'expulsion des étrangers délinquants et la fin des excuses, notamment les levées des réserves d'ordre public ; les mineurs ne pourront plus être enfermés dans les centres de rétention administrative – que j'invite chacun d'entre vous à aller visiter, comme je l'ai fait, pour en connaître la réalité.
J'appelle enfin l'attention de la commission sur le volet de l'intégration, très débattu avant même son arrivée au Parlement.Je ne regrette pas que ce soient cette majorité, et ce ministre, qui aient permis de parler positivement de l'immigration pour la première fois depuis vingt ans. Bien que la rédaction proposée ne me semble pas satisfaisante, je tiens à saluer le fait que la droite sénatoriale, après avoir longtemps critiqué le caractère législatif des mesures en matière de régularisation, ait elle-même pris l'initiative d'introduire des dispositions en ce domaine.
J'appelle également votre attention sur les obligations nouvellement créées : formation des salariés, régularisation dans les métiers en tension, autorisation de travail aux demandeurs d'asile, fin de l'exploitation des personnes en situation d'activité libérale, sanction administrative pesant sur les employeurs ou sur les logeurs, qui ne sont que le miroir de la criminalisation des réseaux de passeurs.