Rappelons ensuite que le juge peut d'ores et déjà prononcer une peine complémentaire d'inéligibilité s'il l'estime adaptée. Il lui appartient de la motiver. Vous décidez d'inverser ce principe : selon les termes de cette proposition de loi, une violence aggravée entraîne l'inéligibilité ; à charge pour le juge de motiver sa décision d'écarter cette peine. Autrement dit, ce même juge n'explique plus pourquoi il sanctionne, mais pourquoi il ne suit pas le code pénal. Le problème, c'est que tous les auteurs de violences aggravées ne souhaitent pas être élus, que toutes les violences aggravées n'interviennent pas dans un même contexte et n'emportent pas des sanctions identiques en toutes circonstances. C'est donc dans la quasi-totalité des cas de violence aggravée que vous obligerez les juges à expliquer pourquoi ils ne prononcent pas la peine.
À travers ce coup de com' à bon compte, vous nous faites glisser lentement mais sûrement vers des réflexes de répression rapide et presque standardisée. Nous le déclarons : cette tendance lourde que vous alimentez est aussi dangereuse qu'inefficace. Votre proposition de loi, dans son empressement, peut conduire à des sanctions disproportionnées, dès lors qu'elles n'auront pas été précédées d'un examen attentif pour analyser finement chaque situation. Curieuse précipitation quand on sait qu'il y a quelques jours seulement, vous hésitiez encore à investir dans une circonscription des Français de l'étranger un candidat condamné pour violences volontaires sur un responsable du parti socialiste.