Lorsque nous avons eu ce débat en commission, j'ai exprimé mon scepticisme et mes interrogations. Je souhaite que nous travaillions sur ce sujet, certaines questions me semblant assez abouties pour que nous puissions avancer – contrairement à ce que j'entends répéter par les uns et les autres. Sur d'autres questions, j'ai cependant un doute, que je souhaite expliquer. Si nous confions aux magistrats d'une juridiction spécialisée le soin de protéger ces femmes, dont certaines se trouvent en danger de mort, il leur appartiendra notamment de délivrer des ordonnances de protection, qui peuvent être renforcées jusqu'à imposer le port d'un bracelet antirapprochement. Je ne comprends pas comment, face aux outrages visés, ces magistrats pourront utiliser ce type d'outils : ce sont des outils de prévention quasi pénale, si vous me permettez cette expression un peu expéditive. Il me semble dangereux de confier aux magistrats des dossiers qui ne correspondent pas aux outils qu'ils utilisent.
J'en viens à ma seconde inquiétude. Je suis tout à fait conscient du fait que la création de ces juridictions spécialisées perturbera l'organisation de notre justice ainsi que nos magistrats. Pardon de le dire, mais ce n'est pas très grave. Les magistrats ont parfois été perturbés et ils ont réussi à l'accepter ; je ne vois donc aucun inconvénient à ce qu'on les perturbe.
En revanche, si nous leur demandons d'emblée de traiter toutes les affaires de violences, aussi bien celles pouvant nécessiter une ordonnance de protection que les outrages sexistes, les juridictions seront vite saturées. Voilà pourquoi je proposerai tout à l'heure de sous-amender un amendement du groupe La France insoumise, qui demande un rapport sur ce sujet. Si, sur les violences intrafamiliales, nous avons des années de recul et savons déjà quoi faire, il est en effet nécessaire de continuer à travailler sur les VSS. Je vous propose de retirer vos deux amendements au profit de celui relatif à la demande de rapport, dont nous discuterons ultérieurement.