Publié le 18 janvier 2024 par : Mme Untermaier, Mme Battistel, Mme Keloua Hachi, Mme Karamanli, M. Saulignac, M. Vicot, M. Vallaud, M. Aviragnet, M. Baptiste, M. Mickaël Bouloux, M. Philippe Brun, M. Califer, M. David, M. Delaporte, M. Delautrette, M. Echaniz, M. Olivier Faure, M. Garot, M. Guedj, M. Hajjar, Mme Jourdan, M. Leseul, M. Naillet, M. Bertrand Petit, Mme Pic, Mme Pires Beaune, Mme Rabault, Mme Rouaux, Mme Santiago, Mme Thomin, les membres du groupe Socialistes et apparentés.
Rédiger ainsi cet article :
« L’article premier de la Constitution est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« « La loi garantit l’effectivité et l’égal accès au droit à l’interruption volontaire de grossesse ainsi qu’à la contraception. » »
Cet amendement d'appel vise à rappeler quelle aurait été la version souhaitée par groupe Socialistes et apparentés pour inscrire le droit à l'IVG dans la Constitution.
En effet, nous aurions préféré la consécration d’un « droit » plutôt que celui d’une « liberté » afin de garantir un véritable droit à l’avortement autonome, sans qu’il soit nécessairement rattaché à la liberté personnelle ou à la libre disposition du corps humain. Nous aurions voulu que la notion de contraception libre et gratuite (féminine et masculine) y figure afin de reconnaître aussi la dimension économique et sociale des questions reproductives. Enfin, nous n’aurions pas rattaché le dispositif à l’article 34 qui maintient la compétence du législateur pour organiser les modalités du recours à l’avortement.
C'est pourquoi nous proposons le dispositif issu de notre proposition de loi n°378 visant à constitutionnaliser le droit à l’interruption volontaire de grossesse et à la contraception. Cette version avait été trouvée suite à un Atelier législatif citoyen ayant rassemblé des citoyens, un médecin gynécologue, l’ancienne présidente du Planning familial, une professeure spécialisée dans le droit constitutionnel et une universitaire américaine.
Cet amendement propose donc d’inscrire la constitutionnalisation du droit à l’IVG à l’article premier de la Constitution, et non à l’article 34, lequel définit le domaine de la loi, et donc laisse au législateur la compétence de déterminer les conditions dans lesquelles s’exerce le recours à l’IVG. Nous craignons que cela ne soit pas assez protecteur.
A raison de l’absence de titre spécifique consacrant la reconnaissance des droits et libertés, l’article premier est progressivement devenu l’écrin de différents droits. En 2009, l’article avait déjà décliné le principe d’égalité femme/homme pour les mandats électoraux, les fonctions électives et les responsabilités professionnelles et sociales. La spécification du principe prendrait donc toute sa place audit article qui consacrerait un nouveau droit autonome, après celui de la parité.
Ensuite, cet amendement consacre le droit constitutionnel à l’interruption volontaire de grossesse mais aussi à la contraception. La modification de la Constitution doit être l’opportunité de garantir l’accès à l’ensemble des droits procréatifs. « Dans la logique de la contraception, je dis qu’est inscrit le droit à l’avortement », déclarait Gisèle Halimi lors de sa plaidoirie en 1972. L’avortement n’est pas un moyen de contraception, mais une solution de dernier recours dès lors que la contraception n’a pas fonctionné par « échec, erreur ou oubli », sans exclure toutefois les autres raisons justifiant un avortement. Qui plus est, les détracteurs de cette liberté n’attaquent pas de front les droits procréatifs mais œuvrent progressivement en rognant petit à petit le cadre légal desdits droits et les conditions d’accès. Avant la quasi-interdiction de l’avortement en 2020 en Pologne, le gouvernement avait déjà restreint l’accès à la pilule du lendemain en 2017, en la conditionnant à une prescription médicale.
Enfin, cet amendement garantit l’effectivité et l’égal accès à ces droits procréatifs. En effet, constitutionnaliser ce droit ne sera suivi que de peu d’effet si son effectivité dans les faits n’est pas garantie et si l’égal accès n’est pas respecté, ce qui à ce jour n’est pas le cas : manque de moyens humains et matériels, diminution ou suppression de subventions aux associations, fermeture des services d’IVG, des maternités et absence de réorientation des femmes confrontées à la clause de conscience des médecins, inégalités territoriales en raison des déserts médicaux, manque de contrôle de l’application de la loi… Inscrire l’effectivité et l’égal accès dans la Constitution oblige l’Etat en ce sens.
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