Publié le 7 avril 2023 par : M. Guedj, Mme Keloua Hachi, M. Olivier Faure, Mme Santiago, M. Leseul, M. Delautrette, Mme Jourdan, M. Bertrand Petit, les membres du groupe Socialistes et apparentés.
Rédiger ainsi l'article unique :
« Le II de l’article L. 1241‑6 du code des transports est ainsi modifié :
« a) Au 1° , les mots : « le 31 décembre 2024 », sont remplacés par les mots : « au plus tôt le 31 décembre 2030 » ;
« b) Au 2° , avant la date : « 31 décembre 2029 », sont insérés les mots : « au plus tôt le » ;
« c) Au 3° , avant la date : « 31 décembre 2039 », sont insérés les mots : « au plus tôt le ».
Le présent amendement des députés Socialistes et apparentés et travaillé avec le groupe de la Gauche communiste, écologiste et citoyenne du Conseil régional d’Île-de-France, vise à revoir le calendrier de mise en concurrence de l’exploitation des transports publics franciliens en reportant, au plus tôt au 31 décembre 2030, son application aux services réguliers de transport routier et en précisant les échéances de fin du monopole des autres modes de transport comme étant les échéances les plus proches et non les plus tardives de mise en concurrence, afin d’éloigner le basculement du réseau de la période olympique et de permettre aux acteurs de mieux se préparer et de tenir compte des échéances électorales de 2026 (municipales), 2027 (présidentielle et législatives) et 2028 (départementales et régionales).
La mise en concurrence (privatisation de l’exploitation) des transports publics d’Ile-de-France est prévue par la loi n° 2009‑1503 du 8 décembre 2009 relative à l’organisation et à la régulation des transports ferroviaires et portant diverses dispositions relatives aux transports.
Elle prévoit la fin progressive des monopoles de la RATP et de la SNCF avec une première échéance au plus tard le 31 décembre 2024 pour le réseau de bus aujourd’hui exploité par la Régie Autonome des Transports Parisiens (RATP) en Ile-de-France. Le réseau de tramways est quant à lui concerné au plus tard le 31 décembre 2029. Le métro, les lignes de RER et Transilien voient l’échéance fixée au 31 décembre 2039.
La loi réservait la possibilité à l’autorité organisatrice des mobilités, Ile-de-France Mobilités, de retenir le ou les futures modes de gestion du réseau de bus RATP après le 31 décembre 2024. Ile-de-France Mobilités a écarté la possibilité de remplacer ce monopole par une régie publique indépendante de la RATP et a fait le choix de recourir à des concessions de service public de transport de voyageurs.
Le réseau historique de la RATP doit être divisé, sur décision d’Ile-de-France Mobilités, en douze concessions distinctes au plus tard le 1er janvier 2025. Ile-de-France Mobilités a lancé neuf des douze procédures d’appels d’offres sans toutefois notifier les marchés à ce jour. D’après les professionnels du secteur et les organisations syndicales représentatives de la RATP, ce calendrier est incompatible avec la continuité du service public lors du basculement vers le nouveau mode de gestion et les douze futurs opérateurs. Le Président Directeur Général de la RATP, Jean CASTEX, a par ailleurs exprimé publiquement et à plusieurs reprises sa préoccupation vis-à-vis de la préparation relative de ce basculement. Plus récemment, des opérateurs de transports privés, français, européens et extra-communautaires, ont exprimé leurs inquiétudes concernant le calendrier de mise en concurrence.
Le transfert d’environ 20 000 agents de la RATP ainsi que les modalités pratiques d’organisation du futur réseau suscitent de vives inquiétudes. Par ailleurs, les décrets d’application nécessaires ne sont pas tous parus et les premiers publiés devront être modifiés.
En effet, les décrets d’application et les modalités retenues, ou en cours de négociations sous l’égide d’Ile-de-France Mobilités, ne prévoient pas toutes les dispositions nécessaires pour assurer la reprise de l’ensemble des agents de la RATP opérant actuellement sur le réseau de surface de la Régie, ni assurer le maintien dans la durée des conditions salariales actuellement en vigueur. Par ailleurs, le transfert entrainera la perte des bénéfices des agents recrutés « au statut ».
Ces décrets prévoient par ailleurs un calendrier d’information obligatoire des agents RATP transférés, ou non, concomitant avec l’organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques (dont la notification du futur concessionnaire et/ou du transfert éventuel trois à six mois avant le 31 décembre 2024).
Il est à noter que le législateur ne pouvait pas anticiper, en 2009, l’organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024 dont l’attribution est intervenue en septembre 2017.
Les incertitudes salariales et organisationnelles relatives à un basculement inédit en France sont majeures. Elles apparaissent incompatibles avec l’organisation d’un événement mondial de premier plan tel que les Jeux de Paris 2024 où 9,7 à 15 millions de visiteurs supplémentaires sont attendus sur la période. Ces incertitudes et bouleversement à venir pénalisent d’ores et déjà la qualité de service en aggravant les difficultés de recrutement et en augmentant le nombre de démissions (644 en 2021 contre 1040 en 2022, dont 610 machinistes-receveurs selon la RATP) dans un secteur déjà en tension.
Le remplacement de la RATP par douze opérateurs privés oblige par ailleurs Ile-de-France Mobilités à acheter les biens nécessaires à l’exploitation du réseau de bus. Ce rachat doit intervenir avant le 31 décembre 2024 afin que les biens soient mis à disposition aux futurs exploitants dès le 1er janvier 2025. Les besoins financiers pour ce rachat sont estimés à 4,9 milliards d’euros d’investissements dont 1,4 milliard d’euros pour les 26 dépôts de bus RATP selon Ile-de-France Mobilités. Ces montants seront principalement financés par l’emprunt et au détriment d’investissements liés à la modernisation du réseau existant.
Pour rappel, le budget primitif 2023 d’Ile-de-France Mobilités prévoit une dégradation sensible de la santé financière de l’autorité organisatrice des mobilités francilienne avec une capacité de désendettement de 15 ans fin 2023.
A ce jour, les dépenses nécessaires à la mise en concurrence des tramways en 2029, des métros, Transilien et RER en 2039 ne sont pas connues et pèseront lourdement dans les futurs exercices budgétaires d’Ile-de-France Mobilités. Par ailleurs, malgré ces incertitudes, Ile-de-France Mobilités a fait le choix d’anticiper l’échéance maximale légale du 31 décembre 2039 pour la mise en concurrence des lignes Transilien avec une fin d’exploitation par la SNCF prévue en 2033.
Pour rappel, la Présidente d’Ile-de-France Mobilités a organisé en janvier 2023 des Assises du financement des transports franciliens sur la période 2024‑2030, axées sur les besoins de nouvelles recettes de fonctionnement. Selon l’Inspection Générale des Finances, 10 milliards d’euros de nouvelles recettes de fonctionnement seront nécessaires d’ici 2031 pour assurer le fonctionnement du réseau. Par ailleurs, en janvier 2022, l’agence de notation Moody’s a dégradé la note et la perspective d’Ile-de-France Mobilités.
Le calendrier actuellement prévu par la loi n’est donc ni tenable dans de bonnes conditions pour les usagers de ce service public, ni souhaitable.
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