Publié le 7 juin 2024 par : M. Clouet, Mme Abomangoli, M. Alexandre, M. Amard, Mme Amiot, Mme Amrani, M. Arenas, Mme Autain, M. Bernalicis, M. Bex, M. Bilongo, M. Bompard, M. Boumertit, M. Boyard, M. Caron, M. Carrière, M. Chauche, Mme Chikirou, M. Coquerel, M. Corbière, M. Coulomme, Mme Couturier, M. Davi, M. Delogu, Mme Dufour, Mme Erodi, Mme Etienne, M. Fernandes, Mme Ferrer, Mme Fiat, M. Gaillard, Mme Garrido, Mme Guetté, M. Guiraud, Mme Hignet, Mme Keke, M. Kerbrat, M. Lachaud, M. Laisney, M. Le Gall, Mme Leboucher, Mme Leduc, M. Legavre, Mme Legrain, Mme Lepvraud, M. Léaument, Mme Pascale Martin, Mme Élisa Martin, M. Martinet, M. Mathieu, M. Maudet, Mme Maximi, Mme Manon Meunier, M. Nilor, Mme Obono, Mme Oziol, Mme Panot, M. Pilato, M. Piquemal, M. Portes, M. Prud'homme, M. Quatennens, M. Ratenon, M. Rome, M. Ruffin, M. Saintoul, M. Sala, Mme Simonnet, Mme Soudais, Mme Stambach-Terrenoir, Mme Taurinya, M. Tavel, Mme Trouvé, M. Vannier, M. Walter.
Après l’article L. 5422‑20‑1 du code du travail, il est inséré un article L. 5422‑20‑1‑1 ainsi rédigé :
« L’accord portant sur la convention pluriannuelle arrêtant les modalités d’application des dispositions législatives relatives à l’assurance chômage mentionnées au premier alinéa de l’article L. 5422‑20 est soumis à l’approbation des assurés sociaux. Sont autorisés à participer au scrutin les assurés sociaux, travailleurs en emploi ou non, âgés de plus de seize ans.
« Pour recueillir l’expression des travailleurs n’étant pas en emploi, l’organisation du scrutin est déléguée à l’organisme France Travail mentionné au premier alinéa de l’article L. 5312‑1 du code du travail. Il ne reçoit aucun moyen public supplémentaire à cette fin. Cet organisme soumet la convention à l’approbation des inscrits au moyen de ses outils et services numériques mentionnés au 3° du II du même article.
« Pour recueillir l’expression des travailleurs en emploi, l’organisme mentionné au premier alinéa de l’article L. 5427‑1 délègue l’organisation du scrutin aux employeurs qui soumettent la convention à l’approbation de leurs salariés par tout moyen nécessaire, notamment au format écrit ou au moyen de services numériques.
« Chaque assuré social ne peut exprimer qu’une seule voix. Les travailleurs en emploi également inscrits auprès de l’organisme France Travail mentionné au premier alinéa de l’article L. 5312‑1 prennent part au scrutin organisé par leur employeur.
« Les résultats de ces scrutins sont transmis au conseil d’administration de l’organisme mentionné au premier alinéa de l’article L. 5427‑1.
« En l’absence de vote conforme des assurés sociaux, une révision de l’accord devra avoir lieu. L’accord est de nouveau soumis à l’approbation des assurés sociaux dans les 2 mois qui suivent.
« En cas d’absence d’accord, la convention précédente devra être prorogée.
« Les modalités du scrutin sont déterminées par un décret en Conseil d’État. »
Par cet amendement, le groupe LFI-NUPES propose de rétablir une gestion démocratique de l'assurance chômage en soumettant toute évolution de ses règles à un vote conforme des assurés sociaux.
Les décrets devant réformer l'assurance chômage sont d'une violence sans nom. Alors que 35% des privés d'emploi sont déjà en situation de pauvreté monétaire, que 30% confessent penser "sérieusement à mettre fin à leurs jours", le gouvernement fait le choix de la violence sociale.
Pour 90 000 créations d'emploi prétendument espérées, ce sont de 200 000 à 300 000 personnes qui perdront leur indemnisation. Les experts sont unanimes : cette réforme va pénaliser les jeunes, les précaires dont les femmes à temps partiel, et les seniors. C'est ainsi qu'une jeune de moins de 25 ans dont le CDD de 6 mois arriverait à terme n'aurait ni droit à l'allocation chômage, ni à un minimal social, et devrait vivre avec 0 euro.
C'est précisément pour contrer ces régressions qu'il y a urgence à sortir l'assurance chômage de la tutelle gouvernementale.
Les mesures proposées dans cette proposition de loi, c'est-à-dire la suppression de la possibilité laissée au gouvernement de ne pas agréer une convention pluriannuelle d'assurance chômage lorsqu'un accord a été trouvé, et la transformation du document de cadrage qui impose des économies exorbitantes à l'Unédic et sabote ainsi les négociations en un document d'orientation non contraignant, constituent un progrès.
Mais ce qu'il est nécessaire d'accomplir, ce n'est pas seulement un rapprochement du mode de gestion paritaire qui fut celui de l'Unédic de 1958 à 2018. Nous proposons ainsi de mettre en place la démocratie sociale dans l'assurance chômage. « Les bénéficiaires gèrent eux-mêmes leurs caisses » déclarait le ministre du Travail Ambroise Croizat en 1946 pour fonder les principes de la Sécurité sociale.
Cette gestion directe de l'assurance chômage par les assurés eux-mêmes pourrait prendre la forme d'un vote conforme conditionnant l'adoption d'une nouvelle convention.
En comparaison du mode de gestion paritaire au sein du conseil d'administration de l'Unédic, une telle réforme présente deux avantages majeurs en termes de gestion.
Premièrement, elle limiterait l’emprise illégitime et exorbitante du patronat sur une caisse dédiée à la protection de tous les travailleurs, qu’ils soient ou non en activité. Les représentants des employeurs disposent de 50% des sièges au sein de ce conseil d'administration, ce qui leur permet d'être majoritaires dès lorsqu'ils obtiennent le soutien d'un seul représentant syndical. Alors que les réformes de l'assurance chômage participent aussi à modifier le fonctionnement du marché du travail pour mettre sous pression l'ensemble des travailleurs, à leur retirer leur pouvoir de négociation sur les salaires et les conditions de travail, on ne perçoit que trop bien le problème démocratique et social que pose cette place privilégiée accordée aux employeurs.
Ensuite, de telles élections représenteraient un moment majeur d’information, favorisant de fait l’accès aux droits : appelés à voter, les électeurs apprendraient le fonctionnement de l’assurance chômage, et la connaissant mieux, y défendraient leur propriété collective, à l’heure où le gouvernement et les organisations patronales encouragent activement la stigmatisation des privés d'emploi et le non-recours aux droits.
Au plan pratique, la consultation des assurés sociaux n'entraînerait aucun coût supplémentaire car elle serait déléguée par l'Unédic aux employeurs et à l'opérateur France Travail. Ce dernier se contenterait d'utiliser les outils et services numériques communs au service public de l'emploi, déjà existants, pour transmettre aux inscrits un lien renvoyant à la convention pluriannuelle d'assurance chômage proposée et leur permettant de la valider ou de s'y opposer.
De toute évidence, cet amendement permettra également le maintien des droits conquis face au risque du chômage, à rebours des évolutions depuis le premier quinquennat Macron.
Pour des raisons de recevabilité financière, et en application de l’article 40 de la Constitution, nous proposons que l'organisation de ce scrutin soit déléguée par l'Unédic à France Travail sans affectation de moyens supplémentaires et aux employeurs, mais il est naturel que l'organisation d'un tel scrutin devra être soutenue par l'attribution de moyens humains et financiers suffisants.
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