Publié le 26 avril 2024 par : Mme Rousseau, Mme Pochon, Mme Garin, M. Lucas-Lundy, M. Peytavie, Mme Sas, Mme Laernoes, Mme Sebaihi, M. Raux, M. Fournier.
I. – À l’alinéa 3, supprimer le mot :
« aquaculture ».
II. – En conséquence, à l’alinéa 9, supprimer le mot :
« aquacole ».
III. – En conséquence, à l’alinéa 9, après le mot :
« rendent »
insérer les mots :
« en particulier en développant les cultures de protéines végétales terrestres et marines à destination de la consommation humaine ».
L'aquaculture est régulièrement promue par les industriels de la filière comme un moyen de combler l'écart entre une demande croissante en poissons et une diminution des captures dans le milieu naturel en raison de la surpêche. Pourtant d’un point de vue scientifique, la réalité est que l’aquaculture ne pourra en aucun cas se substituer à la production naturelle de poissons par les écosystèmes marins et contribue même à accroître la pression sur les populations de poissons sauvages. Ces promoteurs oublient de rappeler une réalité pourtant déterminante : les poissons d’élevage sont nourris à partir de poissons sauvages transformés en huiles et farines. Il faut ainsi en moyenne entre 2,5 et 4 kg de poissons sauvages pour la fabrication d’1 kg de poissons d’élevage. Chez certaines espèces très prisées cette proportion est encore plus importante : le Thon d’élevage par exemple absorbe environ 15 fois son poids en poisson sauvages. Loin d’être une solution miracle à la surpêche, le développement frénétique de la pisciculture depuis les années 1990 contribue à accroître la pression sur les populations de poissons sauvages : la farine et l’huile destinées à l’alimentation proviennent d’une activité halieutique qui représente déjà près d’un tiers des captures mondiales. L’anchois du Pérou, poisson le plus pêché au monde, est majoritairement capturé pour être transformé en alimentation pour l’élevage aquacole.
Le développement de l’aquaculture promu par l’article présent va renforcer encore plus la pression sur les ressources halieutiques. Or, tous les spécialistes nous le disent côté mer, nous sommes au maximum des captures possibles et toute pression supplémentaire ne fera que précipiter l’effondrement de la biodiversité marine. La « pêche minotière » qui capture les poissons destinés à être transformés en huiles et farines animales est particulièrement problématique de ce point de vue. Elle cible et surexploite déjà les "poissons fourrage" situés en bas de la chaîne alimentaire (anchois, sardine, hareng, capelan) et qui constituent la clé de voûte de l’alimentation de nombreux prédateurs (marlin, thon, cabillaud etc.), oiseaux de mer et mammifères marins. Les conséquences d’une augmentation de la surpêche pour soutenir le développement de l’aquaculture pourrait avoir à court terme des conséquences dévastatrices et irréversibles sur la biodiversité marine et les écosystèmes marins déjà impactés par les pollutions (pesticides, engrais, plastique et microplastiques) et le réchauffement climatique. Pour rappel, les scientifiques estiment que les populations des grands prédateurs marins (dauphins, orques, requins) se seraient déjà réduites de 90% en 50 ans du fait de la surpêche.
Par ailleurs, le développement de la pêche minotière pour fournir des farines animales pour l’aquaculture pose un problème d’équité et de justice. Les poissons pêchés forment une composante essentielle de l'alimentation des pays côtiers en développement et sont indispensables à la sécurité alimentaire des populations locales. En Afrique de l’Ouest, l’impact de l’essor de l’aquaculture intensive se fait déjà sentir pour les petits pêcheurs en pirogue qui sont concurrencés centaines de bateaux légaux et illégaux qui déciment les ressources en poissons pour fournir les usines de transformation qui opèrent le long des côtes de la Mauritanie, du Sénégal, de la Gambie et de la Guinée-Bissau. Il n’est pas concevable que la souveraineté alimentaire de la France puisse se construire au détriment de la sécurité alimentaire des populations locales. Nous ne pouvons pas priver de nourriture les communautés côtières pour nourrir nos poissons d’élevage.
Enfin le développement de l’aquaculture, essentiellement pratiquée de manière intensive pose la problématique de la condition animale. Les animaux aquatiques sont les grands oubliés des politiques de protection animale malgré le bon spectaculaire des connaissances scientifiques à leur sujet. Dans les fermes aquacoles, les conditions d’élevage sont souvent désastreuses pour les poissons et génératrices de souffrance (promiscuité, amoncellement de déjections etc.). Il semble donc plus légitime d’avancer d’abord sur l'adoption de règles de protection animale concernant l’élevage, l’abattage et le transport des poissons avant d’encourager le développement de l’aquaculture.
Par conséquent, le groupe écologiste par cet amendement souhaite ne pas désigner l’aquaculture en tant que mission d’intérêt général. Le développement des cultures de protéines végétales terrestres et marines à destination de l’alimentation humaine doit être encouragé et permettra de répondre à tous les impératifs désignés dans l’article 1 d’apports nutritifs, de souveraineté alimentaire, et de cultures écologiques. La France, deuxième pays ayant la plus importante surface littorale, a une grande responsabilité en termes de protection des océans, et dispose avec la culture d’algue d’une opportunité de développement économique et écologique très importante.
Cet amendement s’inspire des propositions de l’Association Végétarienne de France.
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