Publié le 25 avril 2024 par : Mme Trouvé, Mme Abomangoli, M. Alexandre, M. Amard, Mme Amiot, Mme Amrani, M. Arenas, Mme Autain, M. Bernalicis, M. Bex, M. Bilongo, M. Bompard, M. Boumertit, M. Boyard, M. Caron, M. Carrière, M. Chauche, Mme Chikirou, M. Clouet, M. Coquerel, M. Corbière, M. Coulomme, Mme Couturier, M. Davi, M. Delogu, Mme Dufour, Mme Erodi, Mme Etienne, M. Fernandes, Mme Ferrer, Mme Fiat, M. Gaillard, Mme Garrido, Mme Guetté, M. Guiraud, Mme Hignet, Mme Keke, M. Kerbrat, M. Lachaud, M. Laisney, M. Le Gall, Mme Leboucher, Mme Leduc, M. Legavre, Mme Legrain, Mme Lepvraud, M. Léaument, Mme Pascale Martin, Mme Élisa Martin, M. Martinet, M. Mathieu, M. Maudet, Mme Maximi, Mme Manon Meunier, M. Nilor, Mme Obono, Mme Oziol, Mme Panot, M. Pilato, M. Piquemal, M. Portes, M. Prud'homme, M. Quatennens, M. Ratenon, M. Rome, M. Ruffin, M. Saintoul, M. Sala, Mme Simonnet, Mme Soudais, Mme Stambach-Terrenoir, Mme Taurinya, M. Tavel, M. Vannier, M. Walter.
Supprimer l'alinéa 3.
Cet amendement du groupe LFI-NUPES propose la suppression de la notion, introduite par la présente loi à la suite d'une demande de la FNSEA, "d'intérêt général majeur" de l'agriculture, de la pêche et de l'aquaculture.
En effet, d'une part, cette notion nouvelle, floue et ambigue, n'a pas de signification juridique précise et porte atteinte à l'impératif de lisibilité et de clarté du droit. Selon le cabinet de Marc Fesneau, « L’administration puis le juge prendront en considération la qualification législative d’intérêt général majeur dans leur mise en balance des différents intérêts contradictoires en présence ». Mais il apparaît impossible d'en évaluer précisément les conséquences et, pour cette raison, celle-ci devrait être rejetée par le législateur.
L'introduire dans ce texte a-t-il d'ailleurs une autre fonction que celle de jeter de la poudre aux yeux ? Plusieurs juristes en droit de l’environnement contestent le fait que cette nouvelle inscription dans la loi change véritablement la donne. « Le juge ne se dispensera pas du code de l’environnement lorsqu’il examinera la légalité d’un projet », explique le professeur associé à l’université Paris 1 Arnaud Gossement. Comme le rappelle l’avocat, la charte de l’environnement est inscrite dans la Constitution et s’impose donc à la loi, tout comme le droit européen de l’environnement. Exemple avec la directive européenne « habitats-faune-flore » qui fixe le cadre juridique des espèces protégées : pour obtenir une dérogation à l’interdiction de détruire ces espèces, le projet doit notamment présenter une raison impérative d’intérêt public majeur. Un paramètre, distincte de l'intérêt général majeur que ne vient pas bousculer le texte du gouvernement.
Pour autant, s'il apparaît impossible d'en apprécier la portée juridique exacte, cette notion suscite de fortes inquiétudes en termes de régression environnementale, sans apporter aucune solution à la crise traversée par l'agriculture française.
La notion d'intérêt général majeur pourrait notamment être mobilisée de façon à menacer la disponibilité de la ressource en eau et son juste partage, indispensables à une agriculture durable, en favorisant des opérations de pompage abusives dans les nappes phréatiques et dans les cours d'eau. Selon l'analyse du juriste de l'environnement Dorian Guinard, elle pourrait ainsi impacter négativement la régulation des autorisations annuelles de prélèvement ainsi que des restrictions d'eau découlant des arrêtés sécheresse.
Si elle n'est donc pas de la simple poudre aux yeux, l'introduction de la notion d'intérêt général majeur pourrait donc conduire à faires des choix court-termistes préjudiciables à l'environnement, à la durabilité de notre agriculture, et donc à la sécurité économique de nos agriculteurs et à la souveraineté alimentaire de notre pays. Pour l'ensemble de ces raisons, nous appellons à l'effacer de ce texte de loi.
Il est urgent au contraire, de financer et soutenir un modèle agroécologique durable, compatible avec la disponibilité de la ressource en eau, plutôt que d'alimenter un modèle agro-industriel dans l'impasse, comme cherche vainement à le faire le Gouvernement avec cette notion d'intérêt général majeur.
Cet amendement a été travaillé avec le Collectif Nourrir.
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