Publié le 10 mai 2024 par : M. Lachaud, Mme Abomangoli, M. Alexandre, M. Amard, Mme Amiot, Mme Amrani, M. Arenas, Mme Autain, M. Bernalicis, M. Bex, M. Bilongo, M. Bompard, M. Boumertit, M. Boyard, M. Caron, M. Carrière, M. Chauche, Mme Chikirou, M. Clouet, M. Coquerel, M. Corbière, M. Coulomme, Mme Couturier, M. Davi, M. Delogu, Mme Dufour, Mme Erodi, Mme Etienne, M. Fernandes, Mme Ferrer, Mme Fiat, M. Gaillard, Mme Garrido, Mme Guetté, M. Guiraud, Mme Hignet, Mme Keke, M. Kerbrat, M. Laisney, M. Le Gall, Mme Leboucher, Mme Leduc, M. Legavre, Mme Legrain, Mme Lepvraud, M. Léaument, Mme Pascale Martin, Mme Élisa Martin, M. Martinet, M. Mathieu, M. Maudet, Mme Maximi, Mme Manon Meunier, M. Nilor, Mme Obono, Mme Oziol, Mme Panot, M. Pilato, M. Piquemal, M. Portes, M. Prud'homme, M. Quatennens, M. Ratenon, M. Rome, M. Ruffin, M. Saintoul, M. Sala, Mme Simonnet, Mme Soudais, Mme Stambach-Terrenoir, Mme Taurinya, M. Tavel, Mme Trouvé, M. Vannier, M. Walter.
L’article 16 de la Constitution est abrogé.
Par cet amendement d'appel, le groupe LFI-NUPES souhaite supprimer l'article 16 et alerter sur les pouvoirs excessifs du président de la République sous la Vème République.
Les « pouvoirs exceptionnels » du Président de la République traduisent une hyper- présidentialisation, centrés autour d’un homme avec des contre-pouvoirs inexistants.Ces « pouvoirs exceptionnels » sont en réalité les pleins pouvoirs octroyés au Président de la République en vertu de l'article 16. Charles de Gaulle, pour justifier la création de l’article 16 de la Constitution, relevait qu’ « il n’y avait plus de moyen d’obtenir, dans les circonstances où l’on était, un fonctionnement régulier des pouvoirs de la République ».
Dès lors, l’article 16 de la Constitution n’est plus d’actualité. L’article 16 a été pour Charles de Gaulle, la réponse d'une part à la « défaite de juin 1940 » du Maréchal Pétain entraînant le début du gouvernement de Vichy, et d'autre part de la révolution algérienne qui a accéléré la fin de la IV è République. Cet article paraît désuet et la nécessité de recourir à un ""dictateur éclairé"" en temps de crise n'a jamais été prouvé. La IIIème République a pu survivre à la Première guerre mondiale sans le recours à la concentration des pouvoirs autour d'une personne. De plus, l'arsenal juridique d'exception est conséquent en France, l'état d'urgence ou encore l'état de siège, permettent de concentrer les pouvoirs entre les mains de l'administration pour agir vite.
Utilisé qu’une seule fois en 1961, l’article 16 est resté lettre morte malgré les crises les plus profondes de la Vè République - les attaques terroristes et la crise sanitaire. Le maintien de l’article 16 est ainsi inutile au regard du contexte, si ce n’est pour confirmer la posture du monarque présidentiel. Les autres pays de l’Union européenne n’ont pas un tel article, ni en Allemagne, ni en Angleterre, ni en Italie. De fait, cet article est une « archéologie constitutionnelle » (M.Voisset).
Les pleins pouvoirs accordés au Président de la République sont d’autant plus dangereux en l’absence de contre-pouvoirs. Les dispositions de l’article 16 sont larges, peu précises, et laissent une grande marge d’appréciation au Président de la République. En plus de s’opposer au principe de séparation des pouvoirs, cet article laisse le Président de la République prendre des décisions seul. L’article 16 de la Constitution est une porte ouverte à un Président de la République qui voudrait abuser de son pouvoir. Il n’y a en effet pas de contrôle a priori. L’avis du Conseil constitutionnel est simplement consultatif et le Président de la République n’est pas tenu de le respecter. Le Parlement est écrasé par cet article, considérant l’impossibilité de dépôt de motion de censure durant cette période, et le délai de 30 jours pour saisir le Conseil constitutionnel.
Malgré les révisions qui ont tenté d'encadrer les pouvoirs octroyé au Président dans le cadre de l'article 16, le risque de coup de force reste toujours présent. Dans une situation de crise le droit s'efface toujours derrière la puissance.
Lors de la seule utilisation de l’article 16, en 1961, ces pouvoirs exceptionnels étaient déjà considérés comme dangereux. Maurice Duverger (Le Monde, 1961) parlait de « dictature légale provisoire », notamment parce que le déclenchement de cet article est à l’appréciation discrétionnaire du Président de la République. Ce n’est pas au Président de sauver, seul, la démocratie. La démocratie revient aux citoyens.
Dans un Etat de droit, il n’est pas concevable que le Président de la République puisse s’auto- octroyer les pleins pouvoirs par une prise de décision unilatérale. Il faut définitivement supprimer l’article 16 de la Constitution
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