Publié le 7 mai 2024 par : M. Castor, Mme Bourouaha, M. Bénard, M. Chailloux, M. Chassaigne, M. Dharréville, M. Jumel, Mme Faucillon, Mme K/Bidi, M. Le Gayic, Mme Lebon, M. Lecoq, M. Monnet, M. Maillot, M. Nadeau, M. Peu, Mme Reid Arbelot, M. Rimane, M. Roussel, M. Sansu, M. Tellier, M. William.
Après l’alinéa 3, insérer l’alinéa suivant :
« Dans les conditions définies par la loi organique mentionnée au premier alinéa, les populations intéressées de Nouvelle-Calédonie, inscrites sur la liste électorale mentionnée à l’alinéa précédent, sont appelées à se prononcer, à une ou plusieurs reprises, sur l’accession de la Nouvelle-Calédonie à sa pleine souveraineté avant le 31 décembre 2030, dans le cadre d’une convention d’interdépendance inscrite au titre XIV de la Constitution et conclue en application de l’article 88. Si à l’expiration de l’avant-dernière année du mandat du congrès commençant en 2029, celui-ci n’a pas fixé la date de la consultation, cette dernière est organisée, au cours de la dernière année du mandat, à une date fixée par le Gouvernement de la République . »
L’élargissement du corps électoral pour l’élection des représentants aux assemblées de province et au congrès de la Nouvelle-Calédonie ne permet pas, en l’état du présent projet de réforme constitutionnelle, de répondre au sujet de l’issue du processus de décolonisation de la Nouvelle-Calédonie. Ce projet d’amendement propose, dans l’esprit de l’Accord de Nouméa, de prévoir une ou plusieurs consultations de sortie organisée par l’Etat dans un délai de dix ans à compter du nouvel accord global.
A titre de rappel, le dernier alinéa du point 5 de l’accord de Nouméa dispose que « l’Etat reconnaît la vocation de la Nouvelle-Calédonie à bénéficier à la fin de cette période, d’une complète émancipation ». Or, aucun consensus politique n’a été acté à ce jour sur le prochain statut d’une Nouvelle-Calédonie
émancipée. De plus, l’issue des trois consultations sur l’accession de la Nouvelle-Calédonie à sa pleine souveraineté ne permet aucunement de proclamer le droit à l’autodétermination des personnes intéressées en Nouvelle-Calédonie comme étant accompli.
En effet, le peuple kanak, peuple autochtone de Nouvelle-Calédonie dispose d’un droit propre et inaliénable à l’indépendance reconnu non seulement par le droit international mais également par la Constitution de la Vème République au point 18 du Préambule de 1946 intégré au Préambule de 1958 en
ces termes :
“Fidèle à sa mission traditionnelle, la France entend conduire les peuples dont elle a pris la charge à la liberté de s’administrer eux-mêmes et de gérer démocratiquement leurs propres affaires ; écartant tout système de colonisation fondé sur l’arbitraire, elle garantit à tous égal accès aux fonctions publiques et l’exercice individuel ou collectif des droits et libertés proclamés ou confirmés ci-dessus”.
Par conséquent :
- En premier lieu, aucun fondement juridique ne permet de considérer ce droit comme définitivement exercé et éteint. Le droit à l’autodétermination des populations intéressées en Nouvelle-Calédonie demeure et doit donc être protégé;
- En second lieu, l’issue des trois consultations n’indique aucunement quel sera le nouvel accord sur la Nouvelle-Calédonie. Ces consultations ne font que constater que les populations intéressées de Nouvelle-Calédonie étaient divisées et pour certains, à une très faible majorité,
n’étaient pas prêts à ce que ce territoire accède à la pleine souveraineté pour reprendre la question posée lors des référendums de 2018, 2020 et 2021.
- En troisième lieu, ces référendums ne soldent pas la question de l’issue de la décolonisation puisque les populations intéressées n’ont aucunement indiqué qu’ils souhaitaient être rattachés ad vitam aeternam à la France ou qu’ils étaient favorables à un tout autre statut définitif.
Rien n’indique que les populations intéressées ne sont ou ne seront pas favorables à l’accession à la pleine souveraineté à l’avenir d’autant plus que la non-participation à la troisième consultation de 2021, boycottée et contestée par les indépendantistes, emportait la majorité et s’élevait à 56,13 %.
En tout état de cause, il apparaît difficilement concevable que le prochain statut de la Nouvelle-Calédonie soit acté sans prendre en compte dans le cadre d’un consensus politique à définir, les aspirations du peuple autochtone de Nouvelle-Calédonie et des populations intéressées. L’issue de la décolonisation de
la Nouvelle-Calédonie demeure donc.
L’État reconnaît encore cette particularité par sa volonté de maintenir une restriction du corps électoral provincial.
Par conséquent, face à l’examen de la situation ainsi créée, éviter tout référendum couperet de nature à diviser les populations en garantissant l’accès à la pleine souveraineté dans le cadre d’une convention d’interdépendance entre la France et la Nouvelle-Calédonie constitue une solution adéquate pour
sécuriser ce droit à l’autodétermination de ce territoire et d’opérer une transition douce pour toutes les populations de Nouvelle-Calédonie vers sa pleine souveraineté.
Pour que ce droit à l’autodétermination soit garanti et afin de donner de la visibilité aux populations de Nouvelle-Calédonie, le Gouvernement de la République doit sécuriser le déclenchement d’une ou plusieurs consultations en évitant tout blocage et contrainte administrative locale.
Cette solution permettra de prendre en compte la particularité de la Nouvelle-Calédonie, de son histoire et de bâtir le futur contrat social en maintenant un équilibre pérenne entre les communautés qui y vivent tout en répondant aux aspirations du peuple kanak d’établir avec la France des relations nouvelles pour
reprendre le Préambule de l’Accord de Nouméa.
Pour ce faire, fixer une durée de cinq années à compter du nouvel accord politique permettra de réaliser une transition douce et sereine de la Nouvelle-Calédonie vers son émancipation complète.
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