Publié le 9 octobre 2023 par : Mme Lebon, M. Le Gayic, M. Sansu, M. Tellier, M. Castor, Mme K/Bidi, M. Maillot, M. Nadeau, Mme Reid Arbelot, M. Rimane, M. William, Mme Bourouaha, M. Chailloux, M. Chassaigne, M. Dharréville, Mme Faucillon, M. Jumel, M. Lecoq, M. Monnet, M. Peu, M. Roussel, M. Wulfranc.
Le II de la 1ère sous-section de la section II du chapitre premier du titre premier de la première partie du livre premier du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le 5° bis du I de l’article 35 est abrogé ;
2° À la fin du 1° du 1 de l’article 50‑0, les mots : « à l’exclusion de la location directe ou indirecte de locaux d’habitation meublés ou destinés à être loués meublés, autres que ceux mentionnés aux 2° et 3° du III de l’article 1407 » sont supprimés.
Il est proposé de sortir les locations meublées du régime fiscal des bénéfices industriels. Les bénéfices tirés de ces locations seront dorénavant imposés selon le régime foncier réel et micro-foncier qui permet déjà certaines déductions ou imputation de charges.
La multiplication de offres de location touristiques de courte durée depuis une décennie, rendues facilement accessibles à des bailleurs non-professionnels via des plates-formes numériques, a des conséquences négatives de plus en plus visibles.
Dans les zones touristiques, dans les grandes métropoles et les zones côtières en Bretagne ou au Pays basque, des logements quittent le parc locatif privé de longue durée pour être consacrés quelques semaines par an aux touristes, développant nuisances de voisinage, vacance, pénurie et hausse des prix. Face à cette « airbnbisation » du logement, dénoncée un peu partout en Europe, des mesures sont en préparation l’échelle de la Commission européenne, notamment en matière de transmission des données utiles à la régulation de ce marché. Les collectivités locales quant à elles sont de plus en plus nombreuses à s’emparer des outils légaux à leur disposition, notamment la « compensation » de logements loués sur les plates-formes par une offre équivalente en location de longue durée.
En revanche, le modèle économique d’Airbnb reste intact, en raison notamment d’une fiscalité très favorable aux meublés de tourisme, qui bénéficient d’abattements fiscaux allant jusqu’à 71%, ainsi que de généreuses déductions qui permettent à certains de ne payer aucun impôt sur les revenus perçus.
Plus généralement, cette situation met le projecteur sur une législation fiscale particulièrement favorable à la location meublée. Le régime BIC leur procure de copieux avantages par rapport
aux locations nues qui ne sont aujourd’hui plus justifiés. La location meublée profite également d’un régime locatif qui lui confère une plus grande flexibilité, en contrepartie des investissements réalisés par les propriétaires, réduisant encore la légitimité de faveurs fiscales : la durée des baux est réduite à 1 an pour les locataires, 9 mois pour les étudiants (sans reconduction tacite), 1 mois pour les baux mobilité ; en cas de congé vente le locataire ne dispose pas de droit de préemption…
Supprimer les locations meublées du régime des BIC permet de toucher les plus grands investisseurs qui n’ont pas recours au micro régime mais plutôt au régime réel, et ainsi de rééquilibrer réellement les marchés de la location.
Ne modifier que le micro régime (les abattements de 50 et 71 % de l’article 50.0 du CGI) reviendrait d’ailleurs à créer une inégalité de traitement entre des loueurs occasionnels percevant des revenus limités et des loueurs professionnels profitant d’amortissements sur l’ensemble de leurs biens et de reports de leurs déficits sur plusieurs années.
Les rapports publics proposent depuis de nombreuses années de revenir sur ce régime fiscal de la location meublée :
* Rapport d’information relatif à la fiscalité du patrimoine, Jean-Paul Mattei et Nicolas Sansu, au nom de la Commission des finances de l’Assemblée nationale, septembre 2023 : « D’après le Conseil des prélèvements obligatoires, en 2018, la distorsion fiscale introduite par la différence de traitement des locations nues et meublées crée un écart de rendement significatif entre l’investissement dans un meublé (taux de rendement interne -TRI- estimé à 3 %) et l’investissement dans le nu (TRI estimé à 2 %), sans justification économique apparente. » ; « préconise d’harmoniser le traitement fiscal des revenus immobiliers autour d’un régime foncier unique adapté ».
* Rapport au nom de la commission des affaires économiques sur le PLF 2023, Cohésion des territoires, 2022, du rapporteur du budget logement de la commission des affaires économiques : « la distinction fiscale entre meublé et non-meublé se justifiait lors de sa mise en œuvre par une pénurie d’offre de logements meublés sur le marché locatif. Les dynamiques étant désormais inversées, une régularisation fiscale semble s’imposer ».
* Lutte contre l'attrition des résidences principales dans les zones touristiques en Corse et sur le territoire continental, IGF, CGEDD, IGA, Juin 2022 : « Il apparaît ainsi à la mission que les avantages fiscaux octroyés à la location meublée, et a fortiori à la location de meublés de tourisme ne sont pas justifiés par un déficit d’offre » ; « Proposition n° 6 : Aligner le régime fiscal de la location meublée sur le régime fiscal de la location nue. ».
* Évaluation de politique publique, Le logement locatif meublé, IGF et CGEDD, janvier 2016 : ce rapport propose la « suppression du biais fiscal dans les choix des propriétaires implique l’unification des régimes fiscaux de la location nue et de la location meublée ».
* Rapport d’information sur les niches fiscales, Commission des finances de l’Assemblée nationale, Didier Migaud et gilles Carrez, Juin 2008 : « Le régime des loueurs en meublé présente plusieurs spécificités dont la légitimité paraît d’autant plus fragile qu’aucune contrepartie n’est exigée des contribuables en bénéficiant. (…) Le seul critère conditionnant le bénéfice du régime est, en effet, la présence de meubles dans le logement, présence dont on peine à voir pourquoi les pouvoirs publics l’encouragent. (…) L’ensemble des avantages du régime des loueurs professionnels en meublé mérite donc d’être remis à plat. (…) même pour des locations présentant un caractère commercial marqué, le bénéfice de l’abattement prévu par le régime micro-BIC n’apparaît pas justifié et il conviendrait de prévoit l’application d’un abattement au même taux que celui prévu par le régime micro-foncier (soit 30 %). »
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