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Intervention de Gérald Darmanin

Réunion du mercredi 2 novembre 2022 à 9h35
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Gérald Darmanin, ministre :

On peut le dire… Il se trouve que le ministre a lui aussi été élu parlementaire et que, donc, il ne dévalue en rien votre travail. Il reste que ni les députés ni les sénateurs ne sont au-dessus des lois de la République. Et les députés de la Nupes ne sont pas davantage au-dessus des lois de tous les autres députés. Il n'y a pas les règles des uns ni les règles des autres, il y a la loi de la République.

Je rappelle en outre que cette infrastructure agricole a été validée par des gouvernements autres que les nôtres et par des députés qui se disaient écologistes et qui étaient ministres à l'époque.

Je veux dire ici que je suis fier de la façon dont les gendarmes se sont comportés, malgré les provocations et les attaques à coups de pierres, de pieux et de cocktails Molotov. Les événements de Sainte-Soline n'avaient rien à voir avec les manifestations de Gandhi. Vous étiez manifestement du côté de ceux qui ont attaqué les gendarmes à coups de pierres de quinze centimètres et dont la mâchoire a été écrasée. Je le répète, il n'y a pas de pouvoir extraordinaire pour les parlementaires. La grandeur du parlementaire, c'est justement de respecter les lois qui sont votées par le peuple souverain. Alors qu'on a pu noter malheureusement le comportement inacceptable de certaines personnes, élues, je regrette à nouveau, profondément, que vous n'ayez pas eu un mot pour ces pères et mères de famille, pour ces fonctionnaires qui n'ont fait que leur travail sans se livrer à aucune provocation – tout le monde a pu le constater.

J'entends dans vos interventions beaucoup de critiques à l'égard de la police, mais pas un seul soutien. Reconnaître que ce week-end n'avait pas été très flatteur, vous aurez grandi. L'écologie est sans doute trop noble pour être la proie de l'hyperviolence.

Pour ce qui est des suicides évoqués par le groupe RN, ceux-ci existent dans la police, mais aussi dans la gendarmerie ou dans d'autres administrations, comme les douanes. Les raisons sont nombreuses qui peuvent expliquer ces gestes, professionnelles sans aucun doute, personnelles parfois également. Nous manquons, il est vrai, de psychologues. La Lopmi prévoit précisément le recrutement de quarante psychologues par an, dans la police nationale. Se rendre sur une scène de crime – je pense ici aux policiers qui ont découvert le corps de la petite Lola – ou devoir regarder des images pédopornographiques, ça laisse des traces. Or ces policiers, ces gendarmes ne sont pas toujours débriefés psychologiquement. Le risque est alors que les traumatismes, les névroses s'accumulent.

Quant au management, il peut lui aussi être nocif, en effet – je ne cesse d'ailleurs de le répéter. L'ensemble de la chaîne de hiérarchie doit se sentir concernée, car le management ne peut pas être nocif. Vous avez tout à fait raison de dire que nous devons mettre en place un dispositif d'alerte. Il faut, sans aucun doute, améliorer les choses. Je donnerai d'ailleurs un avis favorable à un amendement visant à demander un rapport au Gouvernement sur les suicides dans les forces de l'ordre. Je propose que nous discutions de cette question avec tous les commissaires aux lois des deux assemblées.

Il y a aussi un problème de formation car nous manquons de formateurs dans la police nationale. La formation initiale s'est beaucoup améliorée mais il faut travailler aussi sur la formation continue. La Lopmi prévoit de recruter et de former des formateurs.

Je ne sous-estime pas la question du suicide et je partage la peine de toutes celles et de tous ceux qui sont concernés par de tels drames. Le monde professionnel, extrêmement violent, dans lequel ces agents évoluaient n'a sans doute pas été au rendez-vous de leur accompagnement. Je suis en contact personnel avec la quasi-totalité des familles qui ont été frappées.

Monsieur Latombe, notre souveraineté est essentielle, notamment en matière de cybersécurité. Prenons l'exemple du RRF : malgré le code des marchés publics, ce sont des entreprises françaises qui ont remporté l'intégralité du marché. Airbus, Capgemini, Bouygues, Orange et Atos vont développer ce réseau haut débit sécurisé, tandis que c'est Crosscall, une entreprise d'Aix-en-Provence, qui fournira le téléphone de chaque policier et gendarme. La totalité de ce marché à 2 milliards d'euros revient donc à des acteurs nationaux.

Cela étant, le code des marchés publics ne permet pas de sélectionner uniquement des entreprises françaises. Nous devons donc d'abord favoriser le développement de filières de souveraineté. J'ai par exemple demandé au secrétaire général du ministère de travailler avec les acteurs économiques à recréer une filière souveraine pour les munitions. De même pour l'équipement des policiers ou des gendarmes, qui avant mon arrivée au ministère était fabriqué à Madagascar.

Pour que cela soit possible, il nous faut définir précisément les besoins en amont. C'est comme cela que nous avons pu sélectionner l'Alpine A110 comme voiture rapide d'intervention de la gendarmerie nationale. Cette commande a permis de relancer en partie la production du véhicule, à Dieppe. Il en a été de même pour les 5008.

Appliquée aux nouvelles technologies, et pour que nous n'ayons pas à dépendre de la Chine, d'Israël ou des États-Unis, il faut que nous puissions dire à chacun ce que la loi autorisera demain. Si elle permet l'utilisation de l'intelligence artificielle sur les images de caméra de vidéoprotection, lors des JO notamment, il est préférable de montrer aux investisseurs et aux entreprises que l'on travaille sur la question, pour qu'ils s'intéressent au marché français. À nous de mettre en place des règles d'utilisation des données ou des images afin que ce soit, ensuite, uniquement des entreprises qui les respectent qui soient retenues.

Je crois également beaucoup à l'importance des normes que nous pourrions édicter– nous aurons l'occasion d'en débattre dans l'hémicycle à propos de l'article 4 notamment. Je parle bien de normes et pas de labels, même si ceux-ci peuvent être très respectables. En effet, il faut aborder le cyber comme un incendie dans le monde réel. Les normes en matière d'incendie qui ont été définies et qui doivent être respectées lors de la construction d'un immeuble d'habitation, d'une entreprise ou d'un hôpital public permettent d'assurer un certain niveau de sécurité et de faciliter l'intervention des sapeurs-pompiers, lorsqu'un feu se déclare.

Comment peut-on imposer des normes cyber à une entreprise, à une collectivité locale ou à un particulier ? Ce texte ne prévoit rien en la matière, je veux bien l'avouer, mais cette idée nourrira à coup sûr notre réflexion demain et après-demain. Qui définit les normes, définit le marché. Si c'est nous qui établissons, dans notre droit, les normes que nous souhaitons imposer, nous pourrons aussi accompagner nos investisseurs et nos entreprises, françaises ou européennes, pour les aider à répondre à ces normes. Partant, nous n'aurons pas à subir les normes imposées par les États-Unis, la Chine ou par d'autres pays.

Enfin, je vous précise, et cela ne relève pas du législatif, que nous inspirant de ce que font les militaires, nous allons créer deux directions au sein du ministère. La première aura en charge la recherche, la seconde les partenariats avec les entreprises. Aujourd'hui, nous n'avons pas d'entité chargée des coopérations économiques qui permettrait de travailler très en amont avec les PME, pour mieux comprendre les besoins et les difficultés de chacun. Nous pourrons ainsi prévoir les normes que j'ai évoquées.

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