Ce texte comporte un certain nombre d'avancées, budgétaires notamment. Sur les 15 milliards d'euros prévus, plus de la moitié – 8 milliards – servira à la modernisation de nos forces de l'ordre – informatique ou encore immobilier. On ne peut contester cette avancée, comme on ne peut contester la mesure visant à doubler les effectifs sur le terrain, d'ici à 2030. Nous restons cependant circonspects quant à sa faisabilité, d'autant que le Conseil d'État a indiqué que la crédibilité budgétaire était affectée de nombreuses incertitudes. Nous attendons de voir, si j'ose dire, comment cette promesse, intéressante, se concrétisera sur le terrain.
Ce texte suscite cependant un certain nombre d'interrogations. La première, déjà évoquée, concerne la réforme de la PJ. Monsieur le ministre, je vous demande d'être davantage à l'écoute de tous ceux qui s'expriment sur ce sujet, et pas seulement les policiers. La Conférence nationale des procureurs généraux, les procureurs de la République, l'Union syndicale des magistrats (USM) ou encore les syndicats d'avocats ont tous souligné les incertitudes, voire les dangers que fait naître cette réforme. Certaines grandes voix se sont également fait entendre. Le procureur général près la Cour de cassation, François Molins, lui qui est d'ordinaire plutôt prudent, a ainsi clairement affirmé que cette réforme était porteuse d'un certain nombre de dangers. Le procureur de la République, le vice-président du tribunal de Melun ont expliqué que cette réforme renforçait considérablement le risque de voir « se développer une délinquance de type mafieux ». Quant aux expérimentations menées dans plusieurs départements, elles n'ont pas inspiré de nombreuses louanges, notamment parce que, parfois, les orientations politiques pénales du ministère public n'ont pas été prises en compte dans la manière dont cette réforme est appliquée.
S'agissant des nombreux recrutements annoncés, nous considérons qu'ils impliquent une problématique de formation, à la fois qualitative et quantitative. Je pense notamment à celle des assistants d'enquête, au regard des missions qu'ils auront à remplir.
Par ailleurs, il nous semble que les AFD, même si elles sont présentées comme une facilité supplémentaire, présentent un risque d'arbitraire. Cela pose aussi une question de fond par rapport aux droits des victimes potentielles lorsqu'elles sont directement concernées.
Nous serons particulièrement attentifs aux dispositions portant sur les plaintes en ligne – nous avons déposé un amendement sur ce point. Il nous semble en effet que ce type de plainte devrait être davantage encadré, notamment lorsqu'il y a des victimes directes de violences intrafamiliales ou conjugales. Dans un certain nombre de cas, les victimes devraient pouvoir être reçues, en face-à-face, au commissariat, pour pouvoir s'expliquer. Le dispositif devrait être réservée à celles qui en font la demande.
Enfin, j'aimerais avoir l'avis du Gouvernement sur l'amendement instituant une expérimentation de juridictions spécialisées pour les violences conjugales et sexuelles.