J'apporterai certaines nuances aux propos du président.
Les personnes qui ont été visées par des mesures administratives sont exclusivement des indépendantistes kanak : c'est invraisemblable. J'y vois une posture partisane. S'il s'agissait de rétablir l'ordre, il fallait viser toutes les personnes susceptibles de participer aux troubles. Les décès officiellement recensés – deux gendarmes et cinq Kanak –, sont en majorité le fait de civils. Il aurait donc fallu désarmer les milices dites d'autodéfense, conformément à l'article 9 de la loi de 1955, sans se contenter de proscrire le transport d'armes à feu. Nous avons vu les milices marcher aux côtés des gendarmes dans les rues de Nouméa !
Je suis choqué par le ciblage qui a été opéré d'emblée. Que certains indépendantistes kanak puissent être qualifiés de radicaux, dont acte – même si cette qualification est subjective. Mais les indépendantistes n'ont pas l'apanage de la radicalité : la preuve en est que des civils ont tué des Kanak. Avant même les événements qui ont conduit à l'état d'urgence, des élus non indépendantistes ont affirmé que si le projet de loi constitutionnelle n'était pas voté, ils sèmeraient le désordre dans l'île. Je suis effaré qu'aucune mesure n'ait visé des non-indépendantistes.
Si nos concitoyens renoncent à faire des recours, c'est parce qu'ils savent pertinemment que l'on donne toujours raison à l'autorité administrative : les assignations à résidence n'ont pas besoin d'être justifiées par des faits liés aux troubles, les notes blanches du ministère de l'Intérieur suffisent.
Sans l'état d'urgence, aurait-on pu envoyer des forces de l'ordre en aussi grand nombre dans l'île ? La réponse est oui. L'état d'urgence a-t-il permis de rétablir la paix ? On peut en douter, car les difficultés perdurent. Je le répète, nous aurions dû actionner l'article 9 de la loi de 1955 auprès de l'ensemble de la population, afin de limiter la circulation d'armes et de faire baisser la tension. Seuls les indépendantistes ont été ciblés, ce qui témoigne d'une posture délibérée du Gouvernement. Il revient aux parlementaires de le dénoncer.