Je remercie ma collègue socialiste d'avoir abordé ce thème, qui était le message principal que je souhaitais exprimer dans le cadre de ce travail d'évaluation. Après avoir procédé à une dizaine d'auditions sur ce sujet, j'ai la conviction que les problèmes d'orientation et d'échec que nous avons à traiter au moment de la licence tiennent à tous ceux qui n'ont pas été traités ou qui l'ont mal été auparavant, en particulier au lycée.
C'est la raison pour laquelle j'ai souhaité que nous parlions aussi du baccalauréat. À titre personnel, je pense que le modèle que la France a adopté depuis une trentaine d'années, avec pour objectif « 80 % d'une classe d'âge au bac », selon la fameuse formule de Lionel Jospin en son temps, a aussi de nombreux effets néfastes. La société française s'est en quelque sorte acheté une bonne conscience en donnant à quasiment tout le monde le bac et la possibilité d'entrer à l'université, mais c'est au prix d'importants dégâts, car un très grand nombre de jeunes vont à l'université en n'ayant pas le niveau pour y être – je l'ai entendu dire par des présidents d'université – ou en n'étant pas au bon endroit. Tout cela a des incidences budgétaires mais, à la limite, si ce n'était que cela, ce ne serait pas très grave. Or cela a aussi des incidences psychologiques et sociales déplorables pour la société française.
J'ai observé des progrès depuis quelques années, avec des dispositifs inventés notamment par les présidents d'université depuis la loi ORE. On sait un peu mieux appliquer des traitements individualisés en licence et offrir des parcours adaptés à des étudiants en difficulté. Reste cependant une donnée structurelle : des étudiants qui ont le baccalauréat peuvent facialement entrer à l'université, sans que l'on sache pour autant où ils vont aller. Il y a quelque chose d'hypocrite dans ce système.
Si nous voulons vraiment nous efforcer de résoudre le problème pour qu'un plus grand nombre de jeunes soient mieux orientés et se sentent mieux, sans perdre leur temps dans des formations qui les découragent et les rendent malheureux, nous allons devoir nous interroger sur la manière dont fonctionnent le lycée et le baccalauréat depuis trente ans.
Peut-être va-t-il falloir rendre le baccalauréat un peu plus difficile, et c'est du reste le sens de certaines des annonces faites par le ministère de l'éducation, qui envisage de ne plus apporter de correctifs aux notes, c'est-à-dire de ne plus donner le bac à des gens qui ne l'ont pas obtenu à l'examen. Nous pourrons avoir à ce sujet un beau débat dans la suite de la législature, mais je n'exprime ici qu'un avis personnel.