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Intervention de Dominique Potier

Réunion du mardi 30 avril 2024 à 16h30
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDominique Potier :

Ce qui frappe, dans ce projet de loi, c'est une forme de dissociation entre la gravité du diagnostic et la faiblesse, voire la dangerosité, du texte. Le mur climatique et la falaise démographique menacent non seulement le monde paysan, mais aussi nos sociétés, la civilisation rurale et notre terre : c'est donc à raison que notre collègue Julien Dive a souligné que l'alimentation représente un enjeu géopolitique crucial. Face à ce constat, les mesures proposées dans le texte ne manquent pas d'étonner. Elles me semblent pouvoir être classées en trois catégories.

La première regroupe des mesures qui, sans être insignifiantes ou inintéressantes, restent mineures et ne relèvent nullement d'une loi d'orientation. Nous les considérons avec bienveillance et travaillerons à les améliorer par amendement.

La deuxième catégorie est constituée de dispositions relatives à l'environnement, qui touchent à la hiérarchie juridique existante et nous apparaissent comme des promesses empoisonnées : en plaçant l'agriculture au-dessus de tout plutôt que de bâtir un contrat social fondé sur l'équilibre des droits et des devoirs et sur la prise en compte des limites planétaires, vous empêchez le monde paysan et la société d'avancer main dans la main et de réconcilier le maintien des fonctions de production du secteur agricole et la protection de nos écosystèmes. Ce faisant, vous ne rendez pas service au monde paysan. Vous lui faites même une promesse dont une analyse juridique approfondie pourrait bien prouver le caractère fallacieux : si vous entendez effectivement faire prévaloir la protection de l'agriculture sur la Charte de l'environnement, une révision constitutionnelle est nécessaire ; sinon, vous vous contentez de faire une vaine promesse aux agriculteurs. Une clarification sera donc la bienvenue.

Tout cela serait assez secondaire sans la troisième catégorie de mesures, qui traitent de la question centrale de la terre. Si l'on veut renouveler les générations, il faut réguler le marché foncier. Si l'on veut réussir la transition agroécologique, comme le Haut Conseil pour le climat l'a encore rappelé dans son rapport du mois de janvier, il faut faire le contraire de ce que vous vous apprêtez à faire avec zèle – à savoir déréguler la PAC sur les prairies, les rotations et les infrastructures écologiques. La question cruciale, la seule qui comptera au regard de l'histoire, c'est celle des sols et du partage de la terre : sommes-nous capables de réparer les lois foncières de 1962, qui ont été modernisées au fil du temps, ou bien continuerons-nous à les détricoter ?

Pour tenter d'éteindre l'incendie de l'accaparement des terres, vous utilisez un lance-flammes, le GFAE, une sorte de GFAI relooké – soit le contraire de ce que le monde paysan a essayé de bâtir en matière de régulation et de prospérité, à la fois écologique et sociale. C'est absolument incompréhensible et c'est indigne de la tradition politique que vous incarnez, Monsieur le ministre.

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