Intervention de Alexandre Portier

Séance en hémicycle du lundi 8 avril 2024 à 16h00
Propriété des personnes publiques en polynésie française — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAlexandre Portier :

J'associerai à mon intervention mon collègue Mansour Kamardine, qui est particulièrement engagé, comme vous le savez, pour la défense et la promotion des territoires d'outre-mer.

Le présent projet de loi porte sur la ratification – obligatoire pour les collectivités relevant de l'article 74 de la Constitution – d'une ordonnance, en l'espèce l'ordonnance n° 2023-389 du 24 mai 2023 modifiant les dispositions du code général de la propriété des personnes publiques relatives à la Polynésie française.

Ce texte concerne la question, complexe en droit, des règles applicables à la gestion du domaine public de l'État. Ces règles encore plus complexes lorsqu'elles concernent les outre-mer, compte tenu de leurs évolutions statutaires successives – notamment lorsqu'elles portent sur les collectivités régies par la spécialité législative inscrite à l'article 74 de la Constitution. C'est le cas de la Polynésie française, où le domaine privé de l'État s'étend sur 12,5 kilomètres carrés.

Il nous est proposé de réparer l'omission des règles applicables au domaine privé de l'État en Polynésie dans la législation en vigueur, et d'harmoniser le droit applicable à ce domaine en Polynésie avec le droit commun valant dans les outre-mer.

L'ordonnance y pourvoit en modifiant, en cinq articles, le livre VI de la cinquième partie du CG3P, l'article 6 fixant les responsabilités ministérielles pour ce qui est de l'application de l'ordonnance. L'article 1er prescrit l'application du CG3P au domaine privé de l'État en Polynésie. Les articles 2, 3 et 4 codifient, actualisent et adaptent l'acquisition, la gestion et la cession de biens dans le respect des compétences de la collectivité polynésienne, notamment par l'insertion dans le CG3P de trois articles d'adaptation spécifique à la Polynésie française. L'article 5 abroge les dispositions qui tombent du fait de l'insertion des articles précédents. Il s'agit donc bien d'un texte technique, administratif.

L'État a harmonisé et adapté les règles applicables à son domaine privé dans les territoires d'outre-mer par l'ordonnance n° 2016-1255 du 28 septembre 2016. Néanmoins, jusqu'en 2019, la répartition des compétences entre l'État et la collectivité territoriale concernant le domaine polynésien portait exclusivement sur le domaine public de l'État, comme le prescrivait l'article 14 de la loi organique du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française. Aussi les règles applicables au domaine privé de l'État jusqu'à l'ordonnance de 2023 étaient-elles celles du CG3P antérieures aux modifications de 2016. De plus, la compétence de l'État à définir les règles applicables à la gestion de son domaine privé n'a été établie que tardivement, avec l'entrée en vigueur de la loi organique du 5 juillet 2019 portant modification du statut d'autonomie de la Polynésie française. En effet, la loi organique antérieure répartissant les compétences entre l'État et la collectivité polynésienne n'avait pas formellement confié à l'État l'établissement des règles régissant son domaine privé, et la collectivité polynésienne ne s'était pas saisie de cette compétence.

Huit ans après avoir recodifié les règles applicables à la gestion du domaine privé de l'État dans les outre-mer, cinq ans après l'entrée en vigueur du statut actuel de la Polynésie française, le droit va enfin être actualisé.

On ne pourra pas dénoncer une quelconque précipitation ! Nous ne pouvons qu'encourager le Gouvernement à accroître ses capacités de réaction et, surtout, de simplification du droit. Celui-ci est devenu un mastodonte dont l'inertie freine la mise en œuvre des orientations et l'atteinte des objectifs politiques décidés démocratiquement. Il suffit de parcourir, comme je l'ai fait le week-end dernier, le code général de la propriété des personnes publiques, de son article 1er à son article 5741-1, pour s'inquiéter de l'application du principe selon lequel nul n'est censé ignorer la loi !

L'État de droit, oui, mais le droit n'est jamais une fin ! Au groupe Les Républicains, nous appelons à une reprise en main démocratique de l'action publique et au lancement d'une mission de simplification de l'ensemble de nos normes.

Enfin, il est dommage que la Polynésie n'ait pas été davantage associée à ce texte. La coconstruction ne doit pas être un vain mot.

Néanmoins, constatant que le texte ne suscite pas d'opposition de la part des responsables élus de la Polynésie, et même qu'il recueille l'agrément des collègues polynésiens présents sur ces bancs, et afin de rendre intelligible le droit applicable au domaine privé de l'État en Polynésie française, de le sécuriser et de l'harmoniser, le groupe Les Républicains votera le projet de loi.

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