Intervention de Jérémie Iordanoff

Séance en hémicycle du lundi 8 avril 2024 à 16h00
Propriété des personnes publiques en polynésie française — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJérémie Iordanoff :

Ce texte montre, une fois encore, avec quelle légèreté le Gouvernement traite le Parlement. Je ne conteste évidemment pas le principe des ordonnances prises au titre de l'article 74-1 de la Constitution, mais je regrette qu'il y soit recouru pour certaines questions que le Gouvernement entend se réserver sous prétexte de leur technicité.

Nous débattons de la ratification d'une ordonnance qui porte sur des sujets importants pour la Polynésie française, mais qui n'a fait l'objet ni d'un véritable travail législatif sur le fond, ni de délibérations approfondies, éclairées par une analyse préalable. Nous aurions dû avoir de vrais temps d'échange et d'audition. Monsieur le rapporteur, vous disiez en commission qu'il y avait eu une audition, mais vous conviendrez avec moi que c'est très largement insuffisant. Il n'y aura donc pas eu de travail de fond mené par les députés sur les dispositions du code général de la propriété des personnes publiques relatives à la Polynésie française. C'est d'autant plus regrettable que l'assemblée de la Polynésie française n'a pas pu rendre un avis en raison de la période des élections territoriales, comme l'ont relevé les deux précédents orateurs. J'ajoute que le Sénat a adopté le projet de loi après un débat singulièrement court. Je ne conteste pas que l'ordonnance dont nous débattons a le mérite de clarifier et de sécuriser certains éléments juridiques, mais des points d'alerte demeurent à propos de certaines dispositions du code général de la propriété des personnes publiques relatives à la Polynésie française.

Notre principal sujet de préoccupation concerne les gisements – sur ce point, notre collègue Tematai Le Gayic a déposé un amendement important. L'article L. 5621-2 du code général de la propriété des personnes publiques pose problème et doit être abrogé. Je rappelle qu'il permet de recourir à l'article L. 1127-1 du même code, donnant la possibilité à l'État d'acquérir des biens culturels maritimes lorsque le propriétaire ne peut pas être retrouvé, en application de l'article L. 532-2 du code du patrimoine. Or la loi définit les gisements comme des biens maritimes, et donc comme des biens susceptibles de revenir à l'État in fine. Cela entrerait en contradiction avec l'article 47 de la loi organique du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française, qui dispose : « La Polynésie française réglemente et exerce les droits de conservation et de gestion, le droit d'exploration et le droit d'exploitation des ressources naturelles biologiques et non biologiques, notamment les éléments des terres rares, des eaux intérieures, en particulier les rades et les lagons, du sol, du sous-sol et des eaux sur-jacentes de la mer territoriale et de la zone économique exclusive dans le respect des engagements internationaux. » Il y a là potentiellement un problème juridique qu'il s'agit de prendre en compte. J'ai entendu votre argumentation, monsieur le rapporteur, sur la notion de gisement, qui ne serait pas la même dans le code minier et dans le code du patrimoine, mais même si tel est le cas, je pense que les amendements de M. Le Gayic ne sont pas contradictoires avec votre interprétation des textes.

Le groupe Écologiste votera le projet de loi, en espérant néanmoins que l'ordonnance qu'il a pour objet de ratifier sera encore améliorée par les amendements de notre collègue Tematai Le Gayic.

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