Intervention de Xavier Breton

Réunion du mercredi 27 mars 2024 à 9h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaXavier Breton :

Avec cette proposition de loi, la rapporteure nous invite à une réflexion sur le rapport de l'homme à la nature, qui n'est pas abstraite : elle se concrétise dans le droit où il faut bien souvent concilier des principes, qui peuvent être complémentaires mais aussi devenir contradictoires. En l'occurrence, il s'agit de concilier la liberté d'aller et venir avec le droit de propriété.

Nos débats doivent se situer dans le droit actuel, la loi du 2 février 2023, visant à limiter l'engrillagement des espaces naturels et à protéger la propriété privée. Déposé, à l'origine, par un sénateur du groupe LR, ce texte visait à rétablir les continuités écologiques afin que les espèces animales se déplacent sans contrainte dans les espaces naturels, à répondre aux problèmes de sécurité en termes d'incendies ou de risques sanitaires et à limiter le développement de chasses artificialisées, prenant la forme d'enclos érigés pour favoriser le tir du gibier, ce qui n'est pas opportun. En contrepartie de la réglementation stricte sur l'engrillagement, pouvant représenter une forme d'atteinte à la propriété privée, l'article 226-4-3 du code pénal prévoit de sanctionner d'une amende de quatrième classe le fait de pénétrer sans autorisation dans la propriété privée rurale ou forestière d'autrui. C'est cette dernière disposition que l'on nous propose d'abroger.

Tout d'abord, à peine un an après son adoption, il faudrait déjà modifier ce texte qui n'a fait l'objet d'aucune évaluation. Combien de personnes ont été vraiment verbalisées ? Il me semble qu'avant de tout bousculer, il faudrait prendre le temps d'évaluer. Ensuite, la présente proposition de loi détruirait l'équilibre recherché en 2023 : la contravention était une contrepartie aux contraintes imposées à la propriété privée en matière d'engrillagement. Enfin, les débats du jour pourraient donner l'impression qu'il y a les méchants propriétaires, d'un côté, et les gentils promeneurs, de l'autre. C'est une vision un peu manichéenne. Il suffit d'interroger les agriculteurs et les propriétaires forestiers pour comprendre que les mœurs des promeneurs ont largement évolué : la cohabitation n'est plus aussi paisible et respectueuse de la nature qu'il y a quelques décennies. Cette évolution de la société doit nous inciter à la prudence : il s'agit de ne pas détruire l'équilibre trouvé, allant ainsi à l'encontre de nos objectifs communs de protection de la nature.

Pour notre part, nous voterons contre la proposition de loi, parce que nous continuerons à rechercher un équilibre dans le dialogue entre les propriétaires, les promeneurs, les chasseurs, tous les utilisateurs et amoureux de la nature.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion