Réunis ce matin pour examiner la proposition de loi visant à reconnaître et à sanctionner la discrimination capillaire, nous nous retrouvons sur un point : la volonté de ne pas l'aborder avec la légèreté, le mépris, qui ont ici et là accueilli son inscription à l'ordre du jour. Il n'est en effet pas question de nier ce que ressentent certains de nos concitoyens – des discriminations. Notre devoir de législateur consiste à être à l'écoute ; c'est pour cela que mon collègue Mansour Kamardine a cosigné ce texte. Nous ne demanderons pas, comme nous l'avons beaucoup entendu dans nos circonscriptions, si l'Assemblée n'a pas des sujets plus importants sur lesquels légiférer : certes, notre pays est confronté à de multiples défis, mais on ne saurait en vouloir au rapporteur de ne pas répondre aux attentes des agriculteurs, des acteurs du logement, de tous ceux qui réclament des solutions rapides, concrètes, aux difficultés qu'ils rencontrent.
Le rapporteur, ainsi que les cosignataires de sa proposition de loi, nous invitent à nous poser la question de la discrimination capillaire : il nous faut y répondre, et le niveau qui convient à cette réponse n'est pas celui de la sociologie ou de la philosophie, mais celui du droit. Or les juges, comme l'a rappelé la Défenseure des droits lors de son audition, disposent de l'arsenal juridique nécessaire : parmi les motifs de discrimination, l'apparence physique inclut la nature des cheveux et la façon dont ils sont coiffés. Le rapporteur a d'ailleurs déclaré en commission, avant de le confirmer à l'instant, « qu'il ne s'agit pas d'ajouter un nouveau critère de discrimination, mais de préciser l'un des vingt-cinq critères déjà inscrits dans le code pénal, l'apparence physique ». Une telle précision ne relève pas de la loi, mais de la politique pénale ; au lieu que nous légiférions à nouveau, le garde des sceaux pourrait fort bien, par une instruction, appeler les parquets à porter une attention particulière à la discrimination capillaire. Bref, si ce texte n'apporte rien, à quoi sert-il ? S'il apporte quelque chose, qu'est-ce donc ?