Qu'un tel texte soit mis à l'ordre du jour de l'Assemblée peut sans doute prêter à sourire, notamment au vu des problèmes auxquels sont confrontés nos concitoyens et notre pays. Je ne vous rends toutefois pas responsable de la pauvreté de l'agenda législatif, ni des problématiques qui nous sont soumises.
L'article unique de la proposition de loi vise à intégrer dans le champ de la répression pénale toute discrimination sur « la coupe, la couleur, la longueur ou la texture » des cheveux d'un individu. Il est sans doute superfétatoire, puisque la loi française réprime déjà cette catégorie de discriminations. Parmi les vingt-cinq motifs de discrimination qu'elle interdit, l'un concerne spécifiquement l'apparence physique et inclut, de fait, la nature des cheveux et la façon dont ils sont coiffés. Il n'est donc pas nécessaire d'établir une liste des particularités physiques dans la loi, à moins d'avoir à préparer un texte similaire pour les discriminations subies par les personnes chauves, insuffisamment présentes dans les publicités pour les shampooings, par exemple. Et je ne sais pas où la boîte de Pandore que vous souhaitez ouvrir pourrait s'arrêter.
On comprend l'arrière-plan : le texte vise à importer dans le droit français non le wokisme – à la déception de mes collègues de gauche – mais la législation anglo-saxonne et sa logique victimaire. Les discriminations constatées aux États-Unis et, dans une certaine mesure, en Angleterre, peuvent exister en France dans un cadre professionnel, et la loi permet de les réprimer. La coupe de cheveux du steward d'Air France discriminé était autorisée pour une femme : la Cour de cassation a pénalisé l'entreprise, certes sur le fondement d'une discrimination de genre, mais cela montre bien qu'en la matière, la loi permet de sanctionner, y compris pénalement, les entreprises qui se rendent coupables de ce délit.
Alors que vous me reprochez d'utiliser le terme de « wokisme » à toutes les sauces, ce texte d'une portée symbolique permet à certains d'entre vous de faire de même pour la notion de « racisme systémique ». Cela ne vise qu'à fracturer notre pays et à fragiliser notre République.
C'est pourquoi le groupe Les Républicains ne votera pas le texte, même s'il reconnaît l'engagement du rapporteur et la qualité de ses arguments.