Intervention de Ludovic Mendes

Séance en hémicycle du lundi 18 mars 2024 à 16h00
Adaptation au droit de l'union européenne en matière d'économie de finances de transition écologique de droit pénal de droit social et en matière agricole — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaLudovic Mendes, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République :

Nous sommes réunis pour examiner le deuxième projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne, dit Ddadue, de la législature, qui vise à transposer en droit interne des règlements et des directives de l'Union. Ce texte, composé de trente-quatre articles, porte sur des matières diverses : économie, finances, transition écologique, droit pénal, droit social et droit agricole.

Le Sénat a été saisi de ce texte à l'automne. Il l'a adopté en première lecture le 20 décembre 2023 avant de nous le transmettre dans le cadre de la navette parlementaire.

Si le Sénat a choisi de réunir une commission spéciale chargée de l'examen de ce texte, notre assemblée a renvoyé celui-ci à la commission des lois. Toutefois, des délégations de fond ont été accordées à la commission des affaires économiques, à celle des finances et à celle du développement durable et de l'aménagement du territoire.

La commission des lois a examiné la semaine dernière les articles 4, 5, 21 à 30 et 32. Les deux premiers portent sur le droit des sociétés. L'article 4 ratifie l'ordonnance transposant la directive 2019/2121, qui réforme le régime des fusions, scissions, apports partiels d'actifs et opérations transfrontalières des sociétés commerciales, et opère les modifications subséquentes dans le code de commerce. L'objectif est de renforcer le libre établissement des entreprises dans l'espace économique européen. Je vous propose d'adopter cet article avec quelques corrections du Gouvernement.

L'article 5 habilite le Gouvernement à transposer par ordonnance la directive 2022/2381 relative à un meilleur équilibre entre les femmes et les hommes parmi les administrateurs des sociétés cotées et à des mesures connexes. Le Sénat a souhaité encadrer l'habilitation afin de s'assurer que cette transposition n'entraîne aucun recul pour la représentation des femmes en droit interne.

En effet, la France est en avance sur ce sujet à l'échelle de l'Union européenne : elle a imposé en 2011, par la loi Copé-Zimmermann, un quota de 40 % de femmes dans les conseils d'administration des grandes entreprises, dont le non-respect est sanctionné de manière dissuasive, avant de fixer en 2021, par la loi Rixain, des règles concernant la présence des femmes dans les organes de direction. Sans revenir sur ces exigences, au demeurant respectées par les grandes entreprises, il pourrait être nécessaire d'amender la rédaction du Sénat afin d'éviter des surtranspositions excessives. Le Gouvernement a déposé des amendements à cet effet.

Les articles 21 à 26 visent à transposer la directive 2023/977 du 10 mai 2023 relative à l'échange d'informations entre les services répressifs des États membres. Il s'agit de garantir aux services répressifs compétents d'un État membre un accès équivalent aux informations dont disposent ses homologues d'un autre État membre. Lors de l'examen du projet de loi, le Sénat a réécrit ces articles, mais la rédaction retenue ne paraît ni respectueuse de la directive ni opérationnelle pour les services. C'est pourquoi la commission des lois a adopté des amendements du Gouvernement visant à rétablir la rédaction initiale du texte, modifiée de façon marginale.

L'article 27 adapte le code de procédure pénale au règlement européen 2023/2131, qui fluidifie les échanges d'informations numériques en matière de terrorisme.

L'article 28 met le code de procédure pénale en conformité avec la directive 2013/48 sur plusieurs points relatifs à la garde à vue. Cet article, qui touche aux libertés publiques et fondamentales, a suscité de nombreux débats en commission. Selon la Commission européenne, le droit français ne garantit pas suffisamment la présence de l'avocat durant la garde à vue, dès lors qu'il autorise une audition en son absence s'il ne se présente pas dans les deux heures suivant l'avis qui lui a été adressé. Le Sénat a réintroduit une procédure d'audition immédiate, mais celle-ci ne semble pas tout à fait conforme à la directive. En commission, nous avons pu définir un équilibre solide entre prérogatives des enquêteurs et respect des exigences européennes sur l'accès à l'avocat. Je vous proposerai d'adopter la rédaction retenue.

L'article 29 met le code de procédure pénale en conformité avec la décision-cadre 2002/584 du Conseil de l'Union européenne relative au mandat d'arrêt européen et aux procédures de remise entre États membres. Il n'existe ici aucune marge de manœuvre pour se conformer au droit européen. Le Sénat a adopté cet article sans modification et je vous proposerai de faire de même.

L'article 30 prévoit certaines modalités d'application particulières dans les territoires d'outre-mer. Le Sénat a adopté un amendement du Gouvernement reportant de trois mois l'entrée en vigueur de l'article 28 sur la garde à vue de manière à permettre aux services judiciaires de se préparer, ce qui me semble opportun. Je vous proposerai de l'adopter sans modification.

Enfin, l'article 32 a pour objet de transposer un article de la directive 2019 /1158 du 20 juin 2019 du Parlement européen et du Conseil concernant l'équilibre entre vie professionnelle et vie privée des parents et des aidants. Il prévoit un maintien des droits acquis avant le début d'un congé de paternité et d'accueil de l'enfant, d'un congé parental ou encore d'un congé de proche aidant, pour n'en citer que quelques-uns, en matière, par exemple, de droit à la formation ou aux évaluations annuelles.

Lors de l'examen du texte, le Sénat a opportunément allongé la liste des congés concernés par ce principe. Cet article a été adopté sans modification en commission des lois ; je m'en réjouis. Cette disposition fait résolument progresser notre droit de la fonction publique. Le Gouvernement proposera un article additionnel pour les salariés du secteur privé suite à l'avis rendu par le Conseil d'État le 13 mars concernant la mise en conformité des dispositions du code du travail en matière d'acquisition des congés pendant les périodes d'arrêt maladie.

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