Intervention de Gérard Leseul

Séance en hémicycle du jeudi 14 mars 2024 à 15h00
Discussion d'une proposition de loi — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGérard Leseul :

Tous les indicateurs que vous avez cités nous signalent une hausse des violences à leur égard. Chers collègues du groupe Horizons, votre proposition de loi est timide. Elle ne nous apparaît pas réellement à la hauteur des enjeux. Pour prendre le sujet à bras-le-corps, il était possible de proposer une véritable programmation de mesures destinées à améliorer les conditions d'exercice professionnel des soignants et à réparer ce service public de la santé, fondamental dans la vie des Françaises et des Français.

Concernant nos services publics fondamentaux, les derniers gouvernements ont initié plusieurs travaux de concertation, suivis de lois de programmation qui, si elles se sont révélées décevantes pour beaucoup, portaient néanmoins une réelle ambition.

Ainsi, la loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur, votée ici en 2022 et promulguée en janvier 2023 est issue du Beauvau de la sécurité, organisé entre février et septembre 2021, qui découle lui-même du Livre blanc de la sécurité intérieure de novembre 2020. De même, nous avons adopté la loi d'orientation et de programmation du ministère de la justice 2023-2027, qui découlait elle aussi d'un travail de consultation des professionnels de la justice lors des états généraux de la justice tenus entre octobre 2021 et février 2022.

Alors, mes chers collègues, pourquoi ne pas avoir fait de même pour la sécurité des professionnels de santé ? Pourquoi ne pas avoir travaillé à partir du plan interministériel pour la sécurité des professionnels de santé, présenté en septembre 2023, dont vous n'avez récupéré que les dispositions destinées à aggraver les peines ?

Ce plan, notamment soutenu par l'Ordre national des infirmiers et l'Ordre des pharmaciens et dont le Conseil national de l'Ordre des médecins souhaite l'application rapide, prévoyait pourtant des avancées intéressantes que vous avez écartées : actions de prévention contre les incivilités et les phénomènes de montée en tensions, mesures d'aménagement de l'environnement, dispositifs dans les environnements de travail, organisation des équipes, etc. Il comportait également un volet d'accompagnement des victimes souffrant d'un traumatisme dans la durée qui aurait pu être repris dans votre proposition.

Le problème motivant les dispositions de cette proposition de loi est bien réel, et nous vous remercions sincèrement de mettre en évidence le drame des violences faites aux soignants.

Cependant les moyens proposés apparaissent insuffisants, voire inexistants, puisque ce texte propose essentiellement d'aggraver les peines encourues. Tout repose ici sur ce présupposé que les auteurs d'infraction connaissent le code pénal et les peines prévues pour les délits qu'ils envisagent de commettre ou qu'ils commettent finalement par impulsion !

Aucune violence n'est acceptable, bien sûr, mais, parfois, la violence accompagne pour partie la dégradation de notre offre de soins. Celle-ci détériore la qualité de services et la relation humaine, comme cela a été dit avec cœur par plusieurs collègues. Nous pouvons constater avec regret l'existence de déserts médicaux dans nos campagnes et nos banlieues, des CHU malades, des centres hospitaliers intercommunaux (CHI) dont les services des urgences peinent à rester ouverts, une psychiatrie en grande souffrance, des transports par ambulance embolisés…

Il est regrettable que le Gouvernement n'ait pas pris toutes ses responsabilités. La situation requiert l'engagement de moyens humains, en particulier le recrutement de personnels de sécurité spécialement formés aux problématiques liées à la santé.

Un tel sujet aurait pu donner lieu à une véritable loi de programmation, travaillée en lien avec la représentation nationale. Le groupe Socialistes et apparentés considère que cette proposition de loi est une occasion manquée, elle est pleine de bonnes intentions mais dénuée des moyens qui pourraient assurer à nos soignantes et à nos soignants une véritable tranquillité d'esprit lorsqu'ils œuvrent pour la santé de nos concitoyennes et de nos concitoyens. Par sa modestie, cette proposition de loi ne pourra que décevoir.

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