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Intervention de Patrick Hetzel

Séance en hémicycle du lundi 11 mars 2024 à 16h00
Protection des enfants victimes de violences intrafamiliales — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPatrick Hetzel :

Nous examinons la version définitive d'un texte important, qui a débuté son chemin législatif en décembre 2022. Il permettra de suspendre l'exercice de l'autorité parentale et le droit d'hébergement du parent poursuivi dès l'ouverture d'une enquête pour crime ou violences sexuelles sur l'enfant ou pour crime sur l'autre parent. Dans notre culture, il reste difficile d'envisager le retrait de l'autorité parentale. Pourtant, cette option est devenue nécessaire – et même indispensable – dans l'éventail des moyens de protection de l'enfant victime de sa famille.

La proposition de loi apporte une réponse à la terrible réalité vécue par des centaines de milliers d'enfants victimes d'inceste ou de violences intrafamiliales. Chaque année, en France, près de 160 000 enfants subissent des violences sexuelles. Par ailleurs, 208 000 victimes de violences conjugales ont été recensées en 2021, dont 80 % avaient des enfants. Le rapport de la Commission indépendante sur les abus sexuels dans l'Église (Ciase) présidée par Jean-Marc Sauvé, publié en octobre 2021, estime même que près de 15 % des femmes et plus de 6 % des hommes majeurs auraient subi une agression sexuelle lorsqu'ils étaient mineurs, soit environ 10 % de la population. C'est dire l'ampleur du phénomène et l'importance de l'enjeu dont nous sommes saisis.

Concrètement, le retrait de l'autorité parentale prive l'un des parents de l'ensemble de ses attributions, y compris les plus symboliques, comme le droit de consentir au mariage de son enfant. Ce retrait revient également à confier exclusivement à l'autre parent le soin de veiller sur l'enfant et de prendre les décisions nécessaires à sa santé, à son éducation, etc. Depuis des décennies, les philosophies des différents acteurs de la protection de l'enfance s'opposent sur le sujet. Le législateur doit trancher : il est indispensable de sanctionner le parent coupable de violences extrêmement graves sur l'enfant et de protéger cet être vulnérable physiquement en l'éloignant juridiquement de l'autorité dont il dépend et qui, hélas, parfois le détruit.

Je tiens à saluer le travail et l'engagement constant dont vous avez fait preuve pour défendre ce texte, madame la rapporteure. Grâce à votre travail, nous allons faire avancer cette cause importante. Depuis quelques années, un chemin a été engagé et des avancées ont été obtenues. Citons la loi du 28 décembre 2019 visant à agir contre les violences au sein de la famille, défendue par notre collègue Aurélien Pradié, qui a été adoptée à l'unanimité : elle a créé un mécanisme de suspension provisoire de plein droit de l'exercice de l'autorité parentale et des droits de visite et d'hébergement du parent poursuivi ou condamné, même non définitivement, pour crime contre l'autre parent. Citons également la loi du 30 juillet 2020 visant à protéger les victimes de violences conjugales : elle a étendu les cas dans lesquels les parents peuvent se voir retirer totalement l'autorité parentale ou son exercice, par une décision expresse du juge pénal, aux situations dans lesquelles un parent a été condamné pour des délits sur l'autre parent.

Notre devoir collectif est de veiller à la protection des enfants, ceux qui n'ont pas leur mot à dire parce qu'ils n'ont tout simplement pas les mots pour raconter. Il nous revient d'agir pour les aider. Rappelons que 400 000 enfants vivent dans un foyer où s'exercent des violences conjugales et que, chaque année, 160 000 enfants subissent des violences sexuelles ; dans 90 % des cas, l'agresseur est un homme ; dans la moitié des cas, c'est un membre de la famille.

L'objectif principal qui doit nous guider est la protection des victimes et la préservation de l'intérêt supérieur de l'enfant ; c'est pourquoi les députés du groupe Les Républicains voteront la proposition de loi. Le retrait de l'autorité parentale est une mesure indispensable pour mettre fin à la reproduction des violences familiales de génération en génération.

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