Il est très étonnant que la commission des lois soit amenée à discuter de la réintroduction d'une mesure supprimée par le Sénat, plus précisément par les sénateurs de droite et d'extrême droite, alors que les députés de ces tendances politiques ont décidé de boycotter notre réunion – comme souvent, semble-t-il, lorsqu'il est question des droits des personnes homosexuelles, dont ils n'ont strictement rien à faire.
Dès lors que l'on reconnaît sa responsabilité dans un préjudice, on répare. Nous savons le faire : j'ai entendu les doutes constitutionnels exprimés par M. Di Filippo, mais le Parlement a déjà adopté une disposition similaire concernant les harkis par exemple. Il est essentiel d'engager cette démarche de réparation concrète.
Entre 1942 et 1945, 50 000 personnes ont été condamnées au titre de l'article 331-1 du code pénal instauré par le régime de Vichy. Entre 1945 et 1982, au moins 10 000 individus – sans doute plus, selon les historiens, au vu des zones d'ombre qui entourent ce sujet – ont été condamnés pour le même motif, auxquels s'ajoutent 50 000 personnes condamnées pour outrage aux bonnes mœurs et exhibition, des incriminations utilisées même dans les lieux privés, où les policiers se rendaient pour faire « la chasse aux pédés ». On recense donc, au total, au moins 110 000 victimes de la répression homophobe entre 1942 et 1982.
Si notre amendement vise à rétablir l'indemnisation individuelle, notre groupe souhaite donc également une réparation collective. Je salue le travail extraordinaire du collectif Archives LGBTQI+ et je remercie le ministère de la culture d'y collaborer ; j'espère que la mairie de Paris suivra ce travail et acceptera de le financer. Il est important de favoriser cette culture et cette mémoire collectives, car ce n'est que de cette manière que la société pourra se réparer.