Intervention de Sandra Regol

Réunion du mercredi 28 février 2024 à 9h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSandra Regol :

Monsieur le rapporteur, dans l'exposé des motifs de la proposition de loi et dans vos propos, vous avez ciblé nommément un certain nombre de personnes, ce qui met en lumière, me semble-t-il, les limites de votre texte. Le combat que nous avons à mener ne concerne pas seulement quelques individus, qui constituent la face immergée de l'iceberg, mais une culture dans son ensemble. Nous avons le devoir de changer la société, de mettre fin à la culture de la tolérance, à cette fenêtre d'Overton que l'on trouve aussi bien dans les grands médias, télévisuels et écrits, que sur les réseaux sociaux et aussi dans notre hémicycle. Il faut combattre la tolérance aux propos racistes et antisémites et à la haine de l'autre sous toutes ses formes, que cette altérité soit imaginée ou réelle.

Vous avez choisi d'appréhender l'altérité dans sa diversité. Vous vous êtes essayés à une définition du champ de l'intolérance, qui ne peut jamais être exhaustive, surtout pas dans la loi. Nous vous rejoignons sur le fait qu'aucune démocratie mature ne saurait accepter l'intolérance. Mais se battre contre cette peste qui s'est décomplexée et gangrène notre société exige de comprendre que la haine de l'altérité vient toujours des mêmes personnes. La haine du juif et la haine du musulman, depuis le Moyen-Âge, sont agitées par les mêmes personnes. Ce sont les mêmes individus qui organisent le rejet des droits des personnes LGBT ou des femmes. Il s'agit, à proprement parler, d'un projet politique.

C'est pour cela que la société doit être dotée d'outils de compréhension. Ce que les auteurs de ces propos prétendent, en enrobant la chose dans un beau discours, c'est qu'utiliser certains mots, condamner certaines populations, stigmatiser des personnes en se targuant d'avoir oublié sa propre histoire, ce n'est pas s'extraire de la légalité, cela ne remet pas en question nos fondamentaux démocratiques, ce n'est pas un danger pour notre République. Cette normalisation est l'ennemie de notre démocratie et est en train de la faire imploser.

Si la sanction est un outil parmi beaucoup d'autres, elle n'est pas synonyme de transformation. Voilà l'autre angle mort de votre texte. Il faut faire prendre conscience aux auteurs des faits que leur position les rend eux-mêmes victimes, car on se situe tous dans une relation d'altérité. Je rejoins là Cécile Untermaier sur la nécessité d'une justice restaurative, et j'espère que son amendement sera pris en compte.

Il faut donner des outils à chacun et à chacune d'entre nous. Nous sommes nombreux à recevoir en permanence des messages de haine, à voir circuler sur les réseaux privés de messagerie des appels à la haine et à la mort fondés sur une couleur de peau ou une religion, réelle ou imaginée – car il semblerait que, pour certains, être juif ou musulman ne résulte pas d'un choix ou d'une croyance, mais soit inscrit dans le sang. Peut-être pourrons-nous doter les associations et les réseaux, par voie d'amendement, d'instruments leur permettant d'y faire face.

Les écologistes ont une certaine envie de vous suivre, monsieur le rapporteur, et attendent de connaître le sort réservé à leurs amendements pour décider de leur vote.

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