Intervention de Christine Pires Beaune

Séance en hémicycle du jeudi 29 février 2024 à 15h00
Réduire et encadrer les frais bancaires sur succession — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristine Pires Beaune, rapporteure de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire :

La proposition de loi visant à réduire et à encadrer les frais bancaires sur succession a rassemblé l'ensemble des groupes. Ils l'ont adoptée à l'unanimité en commission des finances, après des améliorations, le 14 février. J'espère qu'il en sera de même aujourd'hui et que ce consensus se maintiendra au Sénat, pour une adoption rapide et une mise en application effective.

Comme je l'ai souligné en commission, la question des frais appliqués par les banques au moment des successions n'est pas un sujet nouveau, mais il est d'actualité et continue à mobiliser. Il a ainsi fait l'objet de plusieurs articles de presse depuis que les débats ont commencé à l'Assemblée nationale.

Il y a deux semaines, l'association UFC-Que choisir, que nous avons auditionnée, a publié une version actualisée d'une étude réalisée en 2021. Le constat est sans appel : ces frais, qui atteignaient en moyenne 233 euros pour une succession d'un montant de 20 000 euros fin 2021, ont depuis augmenté de 25 %, après une hausse déjà importante de 28 % entre 2012 et 2021, donc bien supérieure à l'inflation.

Par ailleurs, l'hétérogénéité des tarifs pratiqués par les établissements bancaires n'a pas diminué ; que les banques n'aient pas été en mesure de justifier ces différences par les services rendus a jeté le doute. En 2023, pour une succession de 20 000 euros, et sur la base des plaquettes tarifaires, les frais bancaires oscillent entre 80 et 527 euros.

L'analyse des grilles tarifaires démontre également une grande variation du seuil en deçà duquel est appliquée la gratuité : il va de 200 à 25 000 euros ! Comment expliquer de tels écarts, sauf à y reconnaître les signes d'une absence de régulation et d'une mise en concurrence peu effective ? Il faut dire que ces frais ne sont pas fréquents dans la vie des ayants droit.

D'un point de vue économique, ils ne représentent qu'une part infime des frais bancaires payés par les clients chaque année – 150 à 200 millions sur un total de 20 à 25 milliards d'euros en 2023 –, mais revêtent une dimension particulière du fait de leur nature.

Ces frais sont appliqués dans des circonstances douloureuses – au moment d'un décès. Ils ne sont pas acquittés par le détenteur du compte mais par ses successibles, qui n'ont d'autre choix que de payer le prix demandé. Chacun se souvient avec émotion de Léo, 9 ans, décédé d'un cancer en 2021, en Gironde ; 138 euros ont été demandés à ses parents pour clôturer son livret A à la Banque postale. L'émotion suscitée par cette pratique, médiatisée et jugée à raison immorale, a mis en lumière le caractère imprévisible et difficilement compréhensible de ces frais. Rappelons qu'en vertu de l'article L. 312-1-7 du code monétaire et financier, la clôture d'un compte est gratuite, quelles qu'en soient les circonstances.

Depuis l'examen de ce texte en commission, j'ai discuté avec des responsables de la Ligue contre le cancer, à leur demande. Ils sont très sensibles à ce problème, qui touche de plein fouet les familles de patients atteints de cancer, jeunes ou moins jeunes, qu'ils accompagnent. Ces frais bancaires viennent grever, parfois de manière significative, les dons versés à leur association par les familles au moment du décès ; eux aussi espèrent le vote de ce texte. Permettez-moi de saluer l'association Eva pour la vie, la fédération Grandir sans cancer, ainsi que toutes les associations qui accompagnent les enfants et les adultes malades.

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