Intervention de Brigitte Liso

Réunion du mercredi 7 février 2024 à 9h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBrigitte Liso, rapporteure :

L'amendement tend à rétablir la rédaction initiale de l'article 4, l'un des plus importants de ce projet de loi. Il vise à lutter contre les dérives thérapeutiques à caractère sectaire. En effet, les discours à caractère sectaire investissent de plus en plus souvent le domaine de la santé, profitant de l'état de vulnérabilité des malades pour les inciter à abandonner leurs traitements ou pour promouvoir auprès d'eux des pratiques dangereuses, en usant de techniques de manipulation et d'assujettissement caractéristiques des dérives sectaires.

Il s'agit d'un problème de santé publique nécessitant une adaptation de notre cadre juridique, car le droit commun ne permet pas de sanctionner de tels discours. Je n'ignore pas que les nouvelles infractions que nous proposons de créer suscitent des inquiétudes. Pour autant, elles sont précisément définies et leurs éléments constitutifs sont minutieusement déterminés. Elles ne permettront pas de sanctionner les personnes qui, de bonne foi et avec bienveillance, entendraient par exemple conseiller un proche. Leur caractérisation, comme pour toutes les infractions pénales, nécessite de rapporter la preuve d'un élément intentionnel. Ici, cette preuve est exclusive de toute bonne foi : il faut une intention de tromper, de profiter de la vulnérabilité d'un malade pour le manipuler, le détourner des soins qui lui sont indispensables ou l'inciter à adopter – bien souvent à acheter – de prétendus remèdes mettant gravement sa santé en péril.

Deux exemples de dérives thérapeutiques à caractère sectaire : la promotion de la consommation exclusive de jus de légumes pour traiter le cancer, allant parfois jusqu'à une prise de contact avec les patients dans les services de cancérologie pour les inciter à abandonner la chimiothérapie ou la radiothérapie ; et la promotion du jeûne total – une nourriture faite d'air et de lumière – qui guérirait les maladies tandis que les médicaments tueraient l'organisme.

Je n'ignore pas les critiques formulées par le Conseil d'État sur cet article, mais je rappelle qu'elles ne portent pas sur le principe des infractions mais bien plutôt sur sa rédaction. C'est pourquoi je souhaite travailler d'ici à la séance publique, en concertation avec le Gouvernement et avec toutes les bonnes volontés, à une rédaction plus fine qui assurerait la sécurité juridique de ces dispositions tout en préservant l'intérêt des victimes. Pour ce faire, il est essentiel d'adopter cet amendement.

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