L'intervention des cabinets de conseil dans les politiques publiques est un sujet politique et polémique ; il occupe le débat public depuis maintenant plusieurs années. L'État recourt très souvent à ces prestataires pour concevoir et mettre en place des politiques publiques qui nous concernent tous. La commission d'enquête sénatoriale, initiée par le groupe communiste, républicain, citoyen et écologiste (CRCE), a montré que ces prestations sont très peu encadrées, souvent opaques et susceptibles de poser des problèmes déontologiques.
En l'absence de législation claire et précise, nous convenons tous de la nécessité d'une loi pour mieux encadrer les relations entre l'État et les cabinets de conseil. Je me réjouis donc que mon groupe ait trouvé un accord avec le groupe GDR-NUPES pour inscrire ce texte à l'ordre du jour. Je salue ici mes collègues Bruno Millienne et Nicolas Sansu pour leur travail de rapporteurs.
L'objectif n'est pas de pointer du doigt les cabinets de conseil, dont le travail permet de contribuer aux politiques publiques et qui sont d'une grande aide pour l'État – je pense en particulier aux prestations de conseil en informatique, un domaine exigeant des qualifications dont l'État ne dispose pas en proportion à ses besoins. En l'absence de véritable cadre légal, les interventions des cabinets de conseil dans les politiques publiques manquent toutefois de transparence : les citoyens se voient imposer des politiques publiques qu'ils imaginent conçues par des fonctionnaires, alors qu'elles ont été élaborées par des cabinets de conseil ; l'État lui-même ne dispose pas de document recensant l'ensemble des prestations de conseil passées et en cours.
De ces manques d'encadrement et de transparence découlent des risques déontologiques, aucune règle ni procédure ne permettant à l'État de contrôler et de se prémunir des conflits d'intérêts. Alors que les passages du secteur public au secteur privé sont fréquents et que le recrutement d'anciens fonctionnaires est devenu un atout pour les cabinets de conseil, l'État doit être en mesure d'éviter tout risque déontologique. Les cabinets ont également tendance à proposer des prestations à titre gratuit et à multiplier les actions de démarchage et de prospection commerciale, renforçant leur réseau et se rendant indispensable aux yeux de l'administration et du politique. Une telle relation de dépendance pose un risque déontologique important, que nous devons éviter.
La France s'est dotée, en 2014, d'une Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, chargée de s'assurer de l'intégrité et de la probité des responsables publics. Le législateur a en particulier décidé de charger la HATVP de contrôler le pantouflage, en lui permettant de rendre des avis d'incompatibilité lorsqu'elle estime que les nouvelles fonctions envisagées sont incompatibles avec les précédentes. Dans la lignée de ces politiques publiques visant à la transparence, nous devons exiger une probité exemplaire des consultants amenés à exercer temporairement des missions publiques. Tel est l'objet de la proposition de loi que nous examinons : définir les prestations de conseil, encadrer le recours aux consultants, en finir avec l'opacité des prestations et renforcer les exigences déontologiques. L'enjeu est également de protéger les données de l'État, car il les communique aux cabinets de conseil, sans préciser quel usage peut et pourra ultérieurement en être fait. Ainsi, je suis convaincu de la nécessité de ce texte. Sous réserve des améliorations et des simplifications qui seront proposées par notre rapporteur du groupe Démocrate, nous voterons en sa faveur.