Les métiers de la médiation sociale sont de plus en plus essentiels dans notre société, aussi saluons-nous l'examen d'une proposition de loi qui vise à mieux en reconnaître les mérites, à en renforcer la formation et à en assurer la structuration et la pérennité. Cette ambition, partagée par le rapporteur et par tous les cosignataires de la proposition de loi, ne date pas d'hier. Je souhaite souligner le travail important de toutes les associations pionnières de la médiation sociale qui, progressivement, se sont constituées en réseaux pour organiser et promouvoir ces métiers au service de nos concitoyens.
Déjà, le rapport Brévan-Picard, qui se rapportait aux nouveaux métiers dans les villes, avait ouvert, en 2000, plusieurs pistes de structuration. En 2001, un groupe de travail, présidé par Yvon Robert, ancien maire de Rouen, avait émis plusieurs recommandations sur les emplois dits de médiation sociale. Les conclusions s'articulaient autour de quatre questions majeures : la stabilisation de ces nouveaux métiers et leur statut juridique, la question des emplois, que l'on appelait à l'époque les emplois-jeunes, le financement de ces emplois, la mutualisation des moyens de la part des employeurs. Une charte de la médiation avait été adoptée à l'issue de ces travaux. Elle précisait que la médiation « intervient dans les interstices, en amont ou en aval d'autres intervenants notamment dans les champs de la prévention, de la sécurité, de l'intégration ou du travail social, et particulièrement des services publics [sans] se substituer aux règles et déontologies propres à chaque profession. » J'ai envie d'ajouter : « et réciproquement », monsieur le rapporteur !
Plus de vingt ans plus tard, la charte existe toujours, mais nous constatons malheureusement dans notre société un lien social dégradé qui se traduit par des tensions vives, parfois très vives, comme celles que nous avons vécues à l'été 2023, des difficultés à accepter l'altérité, une exclusion grandissante des populations fragiles, un éloignement des services publics et une dégradation de l'accès aux droits aggravé par la dématérialisation, voire un sentiment de relégation pour les habitants des périphéries urbaines ou des territoires ruraux. Nous le savons, le besoin de médiation sociale est plus que jamais essentiel.
En commission, le groupe Socialistes et apparentés a présenté plusieurs amendements dont certains étaient inspirés des propositions contenues dans le rapport que vous avez remis au Premier ministre en 2022. Je salue l'adoption de plusieurs d'entre eux, notamment celui qui vise à préciser l'application des référentiels de compétences, de formation et de bonnes pratiques pour les personnes morales, mais aussi pour les personnes privées, celui qui prévoit d'instaurer une obligation de formation initiale pour les nouvelles recrues dans les douze mois suivant leur embauche – après l'adoption de votre sous-amendement, mais je reste attaché à un délai de six mois –, celui qui tend à maintenir l'éligibilité des territoires prioritaires des contrats de ville pour les contrats adultes-relais et enfin, celui dont l'adoption permettra de financer les 7 000 postes supplémentaires que nous évoquerons par la suite. À moins que le Gouvernement ne vienne défaire ce que nous avons fait en commission, l'adoption de nos amendements renforcera le dispositif juridique et répondra à l'ambition donnée à ce texte de reconnaître les métiers de la médiation sociale.
Alors que nous nous apprêtons à débattre du texte dans l'hémicycle, les députés du groupe Socialistes et apparentés défendront plusieurs amendements complémentaires dont les auteurs se sont, là encore, inspirés du rapport de 2022. Ils visent notamment à prévoir qu'une convention soit obligatoirement signée entre la collectivité et la personne morale réalisant la médiation sociale, à éviter ou interdire le recours à la commande publique – les députés du MODEM viennent d'indiquer qu'ils s'y opposeraient, mais nous y tenons –, à garantir que tout organisme de médiation sociale passant une convention avec un commanditaire public soit certifié, à réserver le secteur de la médiation sociale aux acteurs à but non lucratif, à renforcer les obligations et objectifs de formation, à maintenir l'éligibilité des territoires prioritaires des contrats de ville aux contrats d'adultes-relais, enfin, à fixer à la nation un objectif de création de 7 000 postes de médiateurs sociaux supplémentaires.
Si la proposition de loi va dans le bon sens en reconnaissant mieux cette activité essentielle, elle ne saurait être considérée comme un solde de tout compte répondant à l'ensemble des enjeux. Nous en avons déjà discuté, monsieur le rapporteur, et il me semble que vous partagez cet objectif : il faudra que cette ambition trouve sa traduction dans des engagements budgétaires.