Cet article très important traduit en droit ce qui existe dans les faits. Depuis que j'ai l'honneur de présider aux destinées du ministère de l'intérieur, on ne place plus de mineurs dans les CRA, à quelques rares exceptions près, et on y ferme les espaces dédiés aux familles. Nous considérons que les CRA doivent recevoir les personnes qui présentent une particulière dangerosité, ce que ne sont pas les mineurs. L'expulsion des mineurs ne relève d'ailleurs pas des préfets ou du ministère de l'intérieur : elle passe par une décision de justice et mobilise des structures différentes des CRA.
Cette mesure forte et humaniste, c'est notre Gouvernement qui l'aura prise. À la faveur d'autres amendements, nous allons d'ailleurs évoquer aussi les mineurs de 16 à 18 ans et les locaux de rétention administrative (LRA). Et je reviendrai sur le cas particulier de Mayotte.
Nous ne renonçons pas pour autant à éloigner des familles, comme le montrent les statistiques : le nombre d'éloignements, y compris de familles, va progresser d'environ 6 à 8 % cette année, alors que nous avons rencontré des difficultés avec certains pays. Quand nous avons une famille à éloigner, je demande aux services de police de bien préparer tous les documents, et, la veille ou l'avant-veille de l'expulsion, de l'assigner à résidence au domicile ou dans un hôtel situé de préférence près de l'aéroport, en prévoyant une garde. On peut donc procéder avec humanité, en évitant de mettre des enfants ou des adolescents dans un lieu carcéral, tout en poursuivant notre politique d'éloignement.
À Mayotte, la situation est différente, parce que le CRA n'accueille pas seulement des gens qui ont commis des actes de délinquance – ce qui s'explique par la proximité immédiate des Comores, d'où arrive un énorme flux de personnes en situation irrégulière. Dans le cadre de la loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur (Lopmi), vous avez voté pour un doublement des places afin d'atteindre un objectif de 3 000 places à l'horizon 2027, ce qui va notamment permettre la création d'un deuxième CRA à Mayotte. Cette création va permettre de résoudre à la fois des problèmes de capacité et de transport : le nouveau centre sera situé sur l'île de Grande-Terre, alors que le centre actuel se trouve sur Petite-Terre ; l'un accueillera des délinquants et l'autre des personnes faisant seulement l'objet d'une OQTF. Nous avons prévu de ne pas appliquer le présent texte à Mayotte avant le 1er janvier 2027, afin d'avoir le temps de créer ce nouveau centre et de procéder par assignations à résidence, ce qui n'existe pas actuellement. L'article 27 de ce projet de loi indique ainsi que l'article 12 n'entrera en vigueur à Mayotte que le 1er janvier 2027, ce qui laissera largement le temps de s'adapter et de tenir compte de travaux déjà réalisés et de textes à venir : le rapport sur la lutte contre les violences faites aux mineurs en outre-mer des députés Lebon, Dunoyer et Serva ; la loi Mayotte et, je l'espère, un texte constitutionnel permettant de modifier la réglementation et la législation sur ce territoire.
On entend beaucoup de discours humanistes mais, j'y insiste, nous sommes les premiers à rendre concrète cette interdiction de placement de mineurs dans les CRA. Nous la pratiquons déjà, tout en étant plus efficaces dans l'éloignement et en respectant les personnes. J'en appelle d'ailleurs au Rassemblement national, dont les maires n'ont pas répondu positivement à ma demande de créer des CRA sur leur territoire. À la lecture de la presse, j'ai cru comprendre que la commune de Fréjus avait pourtant quelques moyens. M. Rachline m'a envoyé une lettre de trois pages, que je tiens à votre disposition, pour critiquer les CRA. Le Rassemblement national devrait mettre en cohérence ses idées et ses actions. Sur les étrangers ou la rétention, ses membres sont croyants mais pas pratiquants.