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Intervention de Gérald Darmanin

Réunion du vendredi 1er décembre 2023 à 9h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Gérald Darmanin, ministre :

Les articles 9 et 10 concernent les majeurs. La seule réserve d'ordre public que nous conservons intéresse justement les mineurs qui commettraient des délits ou des crimes pendant qu'ils sont mineurs. Les personnes arrivées mineures sur le territoire national et commettant des crimes ou des délits une fois qu'ils sont majeurs relèvent du régime de la majorité, non de celui de la minorité. Pour les mineurs, c'est d'ailleurs le juge, et non le pouvoir administratif, qui décide de l'expulsion.

L'article 10 est, avec l'article 9, l'un des plus importants du projet de loi. Il vise à permettre d'appliquer beaucoup mieux les arrêtés de reconduite à la frontière eu égard aux protections que la loi, et non la Constitution ou les conventions, nous impose. L'article 9 visait les étrangers réguliers pouvant être expulsés du territoire national en raison d'une menace à l'ordre public. L'article 10 concerne les étrangers irréguliers qui, malgré la menace qu'ils représentent, ne peuvent être éloignés du territoire national en raison de réserves d'ordre public : c'est la fin de la fin de la double peine. Ces réserves s'appliquent à tout étranger résidant en France depuis l'âge de 13 ans, résidant en France régulièrement depuis vingt ans, résidant en France régulièrement depuis dix ans s'il est parent d'un enfant français et peut prouver qu'il contribue à son entretien et à son éducation ou s'il est conjoint de Français, titulaire d'une rente consécutive à un accident du travail ou à une maladie professionnelle, résidant habituellement en France et dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences.

Nous proposons que les OQTF puissent concerner toutes ces personnes, si et seulement si elles ont commis un acte illégal sur le territoire national. Le texte ne prévoit pas d'éloigner un étranger qui est arrivé en France avant l'âge de 13 ans et qui est en situation irrégulière à 19 ans ; il permet d'éloigner un étranger arrivé avant l'âge de 13 ans et qui commet un crime à 19 ans. C'est le comportement de la personne qui compte. Voilà pourquoi ce texte n'est fondamentalement pas raciste : il s'intéresse aux comportements, non aux personnes ; à ce qu'elles font, non à ce qu'elles sont. Heureusement, on juge les gens pour ce qu'ils font – c'est la démocratie – et non pour ce qu'ils sont – c'est l'essentialisme. Vous, vous êtes essentialiste, madame Taurinya, quand vous dites que, par nature, nous sommes racistes, alors que je vous dis que c'est le comportement qui compte. C'est peut-être une différence d'appréciation de ce qu'est l'homme.

Le débat sur les OQTF est un peu fou : on demande au ministre de l'intérieur de les appliquer, mais plus de la moitié de ces OQTF fait l'objet de recours, donc sont inapplicables, et la loi votée au début des années 2000 m'empêche d'appliquer l'autre moitié !

Parmi de nombreux exemples, je citerai la lettre que m'a envoyée le préfet de Côte-d'Or le 15 novembre, à propos d'un étranger sous le coup d'une OQTF qui, à 29 ans, fait l'objet de plus de 100 condamnations judiciaires ; le cumul des peines prononcées atteint 31 ans. Arrivé à 12 ans sur le territoire national, il ne peut pas être éloigné, alors qu'il est irrégulier et que sa famille habite dans son pays d'origine. Je vous renvoie à l'étude d'impact du projet de loi pour la liste des éléments qui montrent la nécessité de la mesure que nous prenons.

Nul besoin de réformer la Constitution, de revenir sur la Convention européenne des droits de l'homme (CEDH) ou sur d'autres engagements internationaux de la France. Seule la France a ces dispositifs qui l'empêchent d'éloigner des étrangers déjà irréguliers.

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