Cet article est important. La loi du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l'institution judiciaire permet aux détenus de bénéficier de plein droit d'une libération anticipée sous contrainte lorsque le reliquat de leur peine est de trois mois. Cela s'applique aux Français ou aux étrangers en situation régulière qui ne tomberaient pas sous le coup de l'article 9 ou de l'article 10 du projet de loi, par exemple ceux qui ont été condamnés à des peines de moins de deux ans de prison. Mais cela ne vaut pas pour des étrangers en situation irrégulière.
La libération sous contrainte pour réinsertion concerne ceux qui ont intérêt à se réinsérer dans la société, mais ce n'est pas le cas des étrangers irréguliers, surtout quand ils ont été condamnés de façon définitive à des peines de prison. À moins que l'on ne parte du principe qu'il faut insérer des personnes irrégulières condamnées de façon définitive et ayant fait de la prison.
Monsieur Vallaud, le Conseil constitutionnel et le Conseil d'État reconnaissent que le droit au séjour n'est pas un droit général et absolu – fort heureusement – et qu'une différence de traitement proportionnée est possible, dans un but d'intérêt général, entre deux personnes qui sont dans des situations différentes. C'est le cas ici : l'une est irrégulière, l'autre est régulière ou française ; quant au but d'intérêt général, c'est l'éloignement d'un criminel ou d'un délinquant.
Si nous proposons cet article, c'est que, depuis le 1er janvier, la loi précitée pose des difficultés aux services pénitentiaires et à la police aux frontières. Des libérations anticipées imprévues viennent contrarier l'instruction que nous avons prise. Dans un petit département comme la Dordogne, cette année, sur 88 étrangers éloignables, 27 font partie du public de l'administration pénitentiaire, ont commis des crimes ou des délits, et sont éligibles de plein droit à l'expulsion dans un pays qui accepte ses ressortissants. 27 sur 88, c'est beaucoup. La Seine-Maritime ou la Seine-Saint-Denis sont également concernées.
L'article est essentiel pour éviter les sorties sèches de détenus irréguliers qu'on ne pourrait pas envoyer en CRA et reconduire dans leur pays : il permet d'établir un lien direct entre étrangers irréguliers condamnés en prison, CRA et retour dans le pays d'origine – je le répète, ils n'ont pas vocation à s'intégrer dans la société française ; par leur séjour irrégulier et leur condamnation, ils ont montré qu'ils ne le voulaient pas.