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Intervention de Gérald Darmanin

Réunion du mardi 28 novembre 2023 à 16h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur et des outre-mer :

Je vous prie de m'excuser, madame Genevard, j'ai dû mal m'exprimer hier : ce ne sont pas un tiers des titres de séjour qui sont délivrés au titre du regroupement familial, mais 12 000 à 14 000 titres par an. Ce qui est certain, c'est que l'immigration familiale représente encore plus de la moitié de l'immigration dans notre pays. J'espère que notre travail collectif permettra de faire en sorte que l'immigration familiale devienne moins importante que l'immigration de travail, comme c'est le cas en Allemagne – c'est en tout cas la volonté du Gouvernement. Aux personnes venues au titre du regroupement familial, il faut ajouter celles qui viennent pour le motif de réunification familiale, mais leur nombre total n'est pas si important. Il a même tendance à diminuer année après année, grâce au travail que nous menons.

Par ailleurs, le fonds proposé par M. Pauget me paraît compliqué à mettre en place. De surcroît, le problème n'est pas lié à des exigences qui seraient trop basses en matière de revenu ou de logement : la France est en effet le deuxième pays le plus exigeant de l'Union européenne s'agissant des conditions permettant de bénéficier du regroupement familial. Ce qui nous pose difficulté, c'est la vérification des informations. Vous savez tous que ce sont les maires qui certifient la surface des logements et le montant des rémunérations, après quoi le préfet donne son avis définitif. Ayant été moi-même maire, je sais que cette vérification prend du temps, que tous les maires ne regardent pas forcément les dossiers et que tous ne les font pas vérifier par les services municipaux comme je le faisais moi-même. Dans les plus grandes villes de France notamment, ce sont les services qui font les constatations, et aucune vérification n'est effectuée. Souhaitant remédier à cette situation, nous avons beaucoup discuté avec les sénateurs de la façon d'accroître les moyens pour permettre de meilleures vérifications.

De ce fait, la question des exigences en termes de rémunération et de surface du logement est finalement assez peu dirimante. De la même façon que certains maires n'assurent pas les vérifications, on pourrait imaginer que d'autres refusent de délivrer des avis aux demandeurs alors qu'ils sont censés, en la matière, agir en tant qu'agent de l'État et non en tant que président de leur conseil municipal. C'est au niveau réglementaire désormais qu'il faut agir. En permettant aux préfectures de se concentrer sur la délivrance des premiers titres de séjour – l'automaticité étant ensuite la règle pour les titres pluriannuels –, on leur offrira la possibilité de vérifier si le travail du maire a été bien fait, si j'ose dire, et si les informations concernant la rémunération et le logement sont exactes. Au Canada, le fonctionnement est différent. C'est directement l'État qui émet un avis, et non pas les maires – qui, en France, sont jaloux de ce pouvoir et souhaitent le conserver.

Je vous rejoins en revanche sur la transmission des documents d'identité et voudrais préciser, à cet égard, que le Canada ne permet pas – à ma connaissance – la fraude documentaire. Comme nous, il a des accords avec certains pays dont l'état civil est de confiance. En revanche, lorsque les migrants viennent de pays dont l'état civil a disparu ou dans lesquels la fraude est importante, le Canada ne fait pas confiance aux documents d'origine et les vérifie une fois que les personnes sont arrivées sur son sol. Sur ce point précis, le système est exactement le même qu'en France.

J'émettrai un avis favorable également à l'amendement CL112 relatif à la transmission du casier judiciaire. Il me semble en effet très cohérent avec le reste du projet de loi, qui empêche la délivrance d'un titre de séjour après une condamnation. Le texte initial ne prévoyait pas cette restriction pour le regroupement familial. Les préfectures l'auraient mise en œuvre en opportunité, mais il est préférable de l'inscrire dans la loi.

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