C'est un grand honneur pour moi d'aborder à cette tribune un sujet sur lequel je travaille depuis de nombreuses années. Je suis l'auteur de la loi du 9 juillet 2010 visant à faciliter la saisie et la confiscation en matière pénale. Ce texte a amélioré les dispositifs existants et, surtout, créé l'Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués (Agrasc), un acteur aujourd'hui reconnu.
Depuis la promulgation de cette loi, que s'est-il passé ? D'autres lois ont amélioré les dispositifs. On a commencé à affecter les biens confisqués à la police et à la gendarmerie – notamment les belles voitures rapides –, puis à la justice. Ensuite, la loi du 8 avril 2021 améliorant l'efficacité de la justice de proximité et de la réponse pénale a constitué une étape importante, que je tiens à saluer : elle a permis l'affectation des biens confisqués au service de la population. Cette idée a été empruntée aux Italiens, qui la mettent en œuvre dans le cadre de la lutte antimafia.
Parallèlement à ces évolutions législatives s'est produite, surtout, une évolution des mentalités. Il y a quinze ans, un bon policier ou un bon magistrat disait : « J'ai réussi, car il y a tant de voyous en prison, condamnés à tant d'années de prison ferme. » Désormais, le premier critère est plutôt la saisie et la confiscation des avoirs. Je vous remercie, monsieur le garde des sceaux : je sais l'énergie que vous déployez pour amplifier ce changement de culture.
Si nous voulons que le crime ne paie plus, nous devons parvenir à saisir et à confisquer les avoirs criminels. Tel est le cœur de ma démarche. Il y a quinze ou vingt ans, de nombreux détenus géraient, depuis leur établissement pénitentiaire, la fortune qu'ils allaient retrouver à leur libération. De même, aujourd'hui, une personne condamnée à une peine de prison avec sursis peut se réjouir en sortant du tribunal : « Je n'ai rien eu ! » Si on lui confisque ses biens, au moins aura-t-elle fait l'objet d'une sanction.
Prenons un troisième exemple, tiré de la vie quotidienne. Lorsqu'une personne est placée en garde à vue, elle n'est pas nécessairement appelée à comparaître immédiatement ni condamnée à une peine de prison. Si, en sortant de sa garde à vue, elle rentre chez elle à pied parce que sa voiture a été saisie, la société aura envoyé un premier signal en s'attaquant à son train de vie ostentatoire : il se sera passé quelque chose et la perception des proches et des victimes en sera changée.