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Intervention de Dominique Potier

Réunion du mercredi 22 novembre 2023 à 9h30
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDominique Potier :

Je salue l'initiative du groupe La France insoumise. Cette proposition de loi est stimulante sur le plan intellectuel et pertinente sur le fond.

Le fait que des millions de Français doivent aujourd'hui arbitrer entre le logement, les soins et l'alimentation est un échec collectif. Nous saluons tous ceux qui sont en première ligne et qui lancent des alertes, comme le Secours catholique et le Secours populaire la semaine dernière. Tout converge pour dire que l'on assiste à une augmentation de la pauvreté, ce qui est un scandale dans notre pays, l'une des premières puissances mondiales, où les inégalités n'ont cessé de se creuser. La question de l'accès à l'alimentation et de son coût est cruciale. Je ne développerai pas les catégories particulièrement concernées, nous les avons tous dans notre cœur, mais j'insiste : en aucun cas, la charité ne peut remplacer la justice ; il y a là un combat qui relève de la régulation de la puissance publique.

La position des socialistes s'est toujours fondée sur des contrats tripartites pluriannuels garantissant aux producteurs, aux transformateurs et aux distributeurs une juste rémunération de tous ceux qui travaillent dans la chaîne agroalimentaire. Cet indice de partage de la valeur pourrait être aujourd'hui reconnu et labellisé dans une logique proche des principes du commerce équitable qui pourraient devenir une norme pour le commerce à l'échelle de l'Union européenne mais également les échanges internationaux. Ce sont ces principes que nous devrions chérir, tant pour les normes environnementales que sociales.

Plus pragmatiquement, nous invitons à ce que l'indice de révision du prix de l'énergie et des matières premières soit intégré dans les contrats. Avec un tel dispositif, nous n'aurions pas eu besoin de prendre cette mesurette sur le raccourcissement des délais de trois semaines, puisque nous aurions eu une révision en continu tenant compte de l'inflation de certaines matières premières.

Ces positions historiques rappelées, le groupe Socialiste regarde avec bienveillance cette proposition audacieuse. Je formulerai toutefois trois remarques.

La première touche à la temporalité. S'agissant de choses aussi systémiques, nous préférerions l'esprit d'une expérimentation susceptible d'être approfondie et prolongée au bout d'un an plutôt qu'un dispositif pluriannuel. L'idée d'une situation de crise qui justifierait le déclenchement de ces mesures exceptionnelles que nous pourrions évaluer et pérenniser nous paraîtrait plus adaptée.

Par ailleurs, fixer par la loi des normes sur les taux de marge indécents nous paraît risqué. Vous proposez de vous en remettre plutôt à des décrets qui pourront prendre en compte les références historiques. Cela nous paraît extrêmement sage.

Enfin, il faut préciser la cible pour lever les obstacles pointés par Julien Dive.

À ces réserves près, nous sommes disposés à accompagner cette proposition de loi. Dans ce contexte de crise, il faut sortir de l'ornière. Les marges indécentes ne sont absolument pas justifiables à l'heure où certains de nos concitoyens doivent arbitrer entre leur alimentation et leur santé. Il est urgent de mettre fin à ces pratiques pour le moins obscures, car nous savons que, dans la grande distribution et dans les multinationales de l'agroalimentaire, l'optimisation fiscale sur l'immobilier et les transferts de coûts est une marge majeure de bénéfices.

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