Coprésident, avec Mme Ségolène Amiot, du groupe d'études discriminations et LGBTQI-phobies, je suis très heureux que l'Assemblée nationale examine enfin une proposition de loi consacrée à ce sujet. Très peu a été fait depuis des années pour améliorer les politiques publiques de lutte contre les discriminations, toutes majorités confondues. Dans mon souvenir, le dernier texte en date est la loi du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine, dite loi Lamy, qui n'avait pas donné beaucoup de résultats, non plus que le CV anonyme, par exemple.
La présente proposition de loi est centrée sur le testing. Il existe déjà des statistiques avérant les discriminations. L'association SOS racisme, par exemple, a testé 136 agences immobilières et révélé que 66 d'entre elles, près de 50 %, acceptaient de discriminer des candidats au profil dit arabe ou noir ; un quart se montraient complices en laissant au propriétaire la possibilité de procéder lui-même à un tri discriminatoire des candidatures. S'agissant de l'emploi, au cœur du texte, 45 % des agences d'intérim acceptent de discriminer les candidats, à la demande du client. Quant au rapport entre la police et la population, c'est un domaine où les chiffres explosent : quelqu'un qui est perçu comme noir ou arabe sera contrôlé cinq, dix, vingt fois dans la même journée. Il est certes important de mesurer ce phénomène, mais il est déjà documenté.
Je m'intéresse surtout à ce qui se passerait après l'adoption du texte. Si nous généralisons les tests, que ferons-nous lorsque nous aurons constaté qu'il existe des discriminations dans les entreprises et les agences immobilières, mais aussi peut-être dans les établissements de santé et à l'école ? L'emploi est important, mais il ne faut pas oublier les autres domaines. Pour une entreprise convaincue de discrimination, le dispositif prévoit une amende pouvant se monter à 0,5 % de la masse salariale. Je suis favorable à une sanction efficace, applicable à plusieurs secteurs. Selon moi, il faut créer un ministère dédié à la lutte contre les discriminations et lui octroyer un budget significatif – 1 milliard d'euros, si l'on est ambitieux. Nous n'en sommes pas là. Vous proposez de confier à une délégation interministérielle des moyens et des capacités de sanction – c'est un début.
Votre proposition de loi soulève de nombreuses questions sur le rôle de plusieurs acteurs, comme le Défenseur des droits. Spontanément, c'est à lui que j'aurais confié cette action, mais je viens aussi de souhaiter la création d'un ministère. Il faut étudier toute mesure volontariste. Nous verrons au cours du débat quels sujets seront abordés et jusqu'où nous pourrons aller, en particulier en matière de sanctions.