Ce texte est doublement intéressant, et par son objet, et par son objectif.
Il s'agit d'instaurer un dispositif spécifique pour dépister et objectiver l'existence de discriminations afin d'y mettre un terme. Il s'agit donc de lutter contre les discriminations et en faveur d'une politique publique globale d'égalité réelle.
Nous sommes cependant perplexes quant à ses modalités, car le champ des discriminations retenues est étroit. De plus, les tests ne sont qu'une voie parmi d'autres, dont les audits, pour mettre en évidence les discriminations. Le champ des discriminations, en l'occurrence, se limite au monde du travail et les tests, individuels ou statistiques, se concentrent sur l'embauche, c'est-à-dire à un seul moment du parcours salarial.
Nous regrettons donc que les discriminations dans le domaine du logement ou de la santé ne soient pas incluses dans les prérogatives du futur service de l'État. De plus, le suivi des résultats débouche sur une invitation à mener des négociations au sein de l'entreprise, l'élaboration d'un plan par cette dernière, puis sa transmission à l'autorité administrative, et possiblement, la publication des résultats des tests en cas d'insuffisance des objectifs et des moyens. À quelles conditions une telle publication sera-t-elle effective ?
Le texte prévoit la création d'un comité des parties prenantes mais reste assez vague sur sa composition et sa finalité. Il sera chargé d'élaborer la méthodologie des tests et d'émettre des avis mais rien n'est dit de leur qualité et de leur devenir ? Il désigne également des catégories de participants mais sans préciser les équilibres.
La Défenseure des droits se félicite du sens de cette proposition de loi mais s'est montrée défavorable à l'idée de donner à un service de l'État des compétences définies, au motif qu'il ne présente aucune garantie d'indépendance. Une cinquantaine d'autorités administratives indépendantes ont été créées avec une double préoccupation : assurer la protection des libertés en soustrayant le contrôle de certaines activités à une administration soumise au pouvoir politique, notamment ministériel, et développer la réglementation et la surveillance d'activités dans de nouveaux secteurs sensibles sur un plan économique et social. Leur statut leur garantit leur indépendance et leurs membres ne sont pas révocables.
Cette question doit être centrale pour la création de cette nouvelle entité. Pourquoi créer une instance alors que des autorités administratives indépendantes peuvent déjà exercer de telles compétences ? Pourquoi faire compliqué quand il est possible de faire simple ? Notre groupe, en l'état, est réservé sur ce texte et n'entend pas le voter.