Chargé du titre VI, dont les deux articles traitent d'enjeux majeurs, je serai la voix des territoires ultramarins. L'article 26 a vocation à déterminer l'application spécifique aux outre-mer des dispositions du projet de loi, et l'article 27 détermine les modalités d'entrée en vigueur de certaines d'entre elles.
Je salue la démarche du Gouvernement, qui a pris l'engagement devant le Sénat d'inscrire directement dans la loi les dispositions applicables à certains territoires d'outre-mer plutôt que de recourir à une mise en œuvre par ordonnance. L'adoption par le Sénat d'un amendement du Gouvernement à l'article 26 a permis d'exclure du champ de l'habilitation à légiférer par ordonnances la Guadeloupe, la Martinique, la Guyane, La Réunion, Mayotte et Saint-Pierre-et-Miquelon. Nous aurons, pour ces territoires, la possibilité de déterminer directement dans le projet de loi les mesures dont nous souhaitons qu'elles s'y appliquent.
En revanche, Saint-Martin, Saint-Barthélemy, Wallis-et-Futuna, la Polynésie française et la Nouvelle-Calédonie feront l'objet d'ordonnances. La situation de ces collectivités mérite entièrement de faire l'objet d'un débat parlementaire devant la représentation nationale. Je me réjouis que nous ayons ce débat.
Toutefois, si ces territoires ultramarins justifient pleinement l'attention du législateur, ils ne peuvent faire l'objet d'une approche monolithique. Les onze territoires d'outre-mer habités présentent une diversité d'enjeux, qui ne peuvent être abordés sous le prisme d'une norme unique. La situation de la Guyane, qui compte 35 % de personnes étrangères sur son sol, n'est pas comparable à celle de la Guadeloupe, où la proportion d'étrangers en situation irrégulière est estimée à 4 % de la population. La Guyane, qui partage des centaines de kilomètres de frontière terrestre avec le Surinam et avec le Brésil, ne présente pas les mêmes difficultés que les îles de Saint-Pierre-et-Miquelon, situées au large de l'Amérique du Nord et ne comptant que quatre-vingts étrangers sur leur sol.
Certaines de ces collectivités font face à des flux importants d'entrées irrégulières. Le cas de Mayotte est emblématique : un tiers de la population y serait en situation irrégulière. D'autres collectivités, Saint-Pierre-et-Miquelon par exemple, peinent au contraire à attirer la main-d'œuvre suffisante pour répondre aux besoins du marché du travail.
En tant que rapporteur, j'ai choisi de mener une concertation avec les onze territoires situés en outre-mer. À chaque audition, j'ai associé tous les représentants du territoire – services de l'État déconcentrés, élus locaux, parlementaires et associations – afin de recueillir tous les points de vue et de bâtir des propositions faisant l'objet d'un consensus.
J'ai la profonde conviction qu'aucune mesure ne doit être adoptée sans une très large adhésion des territoires concernés. Cette conviction guidera mon travail lors de nos discussions. J'indique d'emblée qu'il me semble nécessaire de réfléchir à des mécanismes de territorialisation des métiers en tension, tels qu'ils sont définis par le projet de loi. Leur liste ne saurait être établie de façon uniforme et unilatérale pour les territoires d'outre-mer, qui présentent de fortes particularités en matière d'emploi et de besoins de main-d'œuvre.
Le besoin d'un mécanisme de consultation des acteurs locaux a été exprimé à plusieurs reprises par les acteurs des territoires que j'ai auditionnés. Dans le même esprit, la durée des titres de séjour délivrés dans le cadre du mécanisme de régularisation prévu à l'article 4 bis devrait pouvoir être modulé afin de tenir compte de l'éloignement et des délais de traitement de la délivrance des titres de séjour dans certains territoires ultramarins.
Le travail de concertation que je mène a vocation à se poursuivre dans les prochains jours. À l'issue de ce travail, je proposerai des solutions sur mesure pour chaque territoire ultramarin, le cas échéant en fonction des souhaits que leurs représentants auront exprimés et des besoins que ces auditions auront permis d'identifier. Le cadre constitutionnel nous permet de procéder à ces adaptations, afin de tenir compte des caractéristiques et des contraintes particulières de ces collectivités. Je formule le souhait que nos travaux en commission nous permettent de nous saisir pleinement de cette opportunité, afin d'accorder à ces territoires toute l'attention qu'ils méritent. Dans cet esprit, que pensez-vous, monsieur le ministre, de la démarche permettant de consacrer un article à chaque territoire ?