Malgré un programme très chargé, j'ai tenu à ce que 75 % de la SAU française soit représentée car, après l'audition des représentants des chambres et de l'Inrae, il me semblait qu'il manquait un chaînon, celui des instituts techniques. Je vous remercie donc d'avoir répondu à notre invitation. Nous avons par ailleurs auditionné les acteurs de la vigne et les arboriculteurs, ce qui doit nous avoir permis de couvrir 90 % des cultures sur les questions liées aux produits phytosanitaires dans notre pays. Il est intéressant de vous entendre en fin de parcours : sans remettre en cause votre travail, alors que tout le monde dit qu'il fait bien son travail – Julien Denormandie vient de l'affirmer, pendant une heure –, depuis dix ans, nous n'obtenons pas les résultats que nous nous sommes fixés. Il faut le constater, avec humilité et un souci de vérité.
Je connais Anne-Claire Vial depuis 2014, alors qu'elle présidait la chambre d'agriculture de la Drôme : la visite de la plateforme de la Drôme, dans le cadre de la préparation de mon rapport, m'avait édifié quant au volontarisme et à la capacité d'innovation qu'elle décrit. J'ai aussi bien connu les combats des acteurs de la filière des oléoprotéagineux en France. J'ai confiance dans le fait que notre discussion permettra de se dire les choses en face et d'aller au fond des questions : nous ne sommes pas là pour des plaidoyers généraux mais pour entrer dans le vif du sujet.
Premier sujet : nous avons une recherche, des instituts, des chambres extraordinaires mais, à la fin, l'agriculteur écoute surtout son conseiller phyto, même si on a séparé juridiquement le conseil et la vente. L'indication, c'est le marché, donc le conseiller commercial. C'est terrible pour nous : autant de recherche, autant d'instituts – et je connais vos plateformes et vos efforts – pour des résultats si maigres . Les fermes Dephy réduisent leur utilisation des produits phyto de 25 % : on se dit qu'une baisse globale d'au moins 20 %, aurait pu être atteinte, si on les avait démultipliées.
De même, pour le nombre de doses unités (Nodu) et la quantité de substances actives (QSA), on constate une petite baisse générale, que l'on sait à peine interpréter. Ce qui a marché, ce sont les mesures réglementaires et un peu le marché – la bio, les signes officiels de la qualité et de l'origine (Siqo). Cela a stabilisé une tendance, qui aurait eu lieu autrement.
Nous devons regarder le problème en face : qu'est ce qui ne fonctionne pas, entre la recherche fondamentale, les instituts techniques, les chambres et le monde agricole ? Qu'est-ce qui ne remonte pas assez du monde agricole ? Pourquoi le dispositif ne produit-il pas de résultats ?
Le continuum est pour nous défaillant – le terme de « faillite » serait excessif. Les moyens mis sont insuffisants pour les instituts par rapport à l'objectif que l'on vous assigne en matière de réduction des produits phytosanitaires. Mais globalement, cela ne marche pas. Comment l'envisagez-vous ? Ne cherchez pas à vous justifier, essayons de définir ensemble ce qui pourrait marcher.