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Intervention de Dominique Potier

Séance en hémicycle du mardi 14 novembre 2023 à 15h00
Lutte contre l'inflation concernant les produits de grande consommation — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDominique Potier :

la situation est absolument dramatique.

La crise que nous traversons aurait dû susciter une réforme profonde de notre économie et un élan de partage dans notre société. Une modification du partage de la valeur aurait dû intervenir à deux niveaux. D'abord entre le travail – le salaire – et le capital : il faut que la déformation, initiée dans les années 1990, cesse. Il faut également repenser l'allocation des salaires et leur répartition au sein de l'entreprise. Suite aux travaux parlementaires que nous avons menés, je ne citerai que quelques chiffres, édifiants : 0,3 % des Français gagnent un salaire supérieur à douze fois le Smic. La somme supérieure à ces douze Smic représente 9 milliards d'euros. Répartis sur le premier décile des travailleurs pauvres, ces 9 milliards permettraient d'augmenter les salaires de 300 euros. En faisant le même exercice jusqu'au revenu médian, on approcherait les 100 euros. Ce pouvoir d'achat mieux réparti aurait constitué une arme solidaire pour faire face à la crise du pouvoir d'achat que nous constatons.

En outre, cette crise aurait dû susciter la condamnation de tous les profits indécents – décrits par les orateurs précédents : ceux de certaines firmes agroalimentaires qui sont dans une situation de quasi-monopole du fait de la puissance de leur marque, et font danser les prix à leur profit, mais également ceux de certains distributeurs – quatre centrales d'achat forment une oligarchie, qui capte 80 % du marché agroalimentaire et fixe les prix.

Nous aurions aimé disposer d'instruments afin de mieux détecter les valeurs ajoutées camouflées dans la grande distribution par une fiscalité opportune et le jeu de l'immobilier et, pour les multinationales, par le flux des capitaux et des profits hors des frontières. Au lieu de cela, nous devons nous contenter d'un projet de loi petit bras et d'une future loi des petits pas.

Le groupe Socialistes et apparentés a proposé quelques réformes d'opportunité : interdiction de ces pratiques commerciales honteuses qui visent à diminuer le volume du produit vendu pour en maintenir le prix – ce qui revient à l'augmenter ; vérification que le seuil de revente à perte se traduit effectivement par une plus-value pour les producteurs ; révision obligatoire des prix, en cas de baisse du coût de l'énergie notamment, afin de répercuter immédiatement la baisse aux consommateurs ; transparence sur les matières premières agricoles ; affichage du partage de la valeur.

Aucune de ces réformes n'a été adoptée. Pourtant, elles sont dans le droit fil de ce que nous défendons inlassablement depuis l'adoption des trois lois Egalim : un contrat tripartite associant producteurs, transformateurs et distributeurs, un partage de la valeur incluant à la fois le monde paysan et l'ensemble des travailleurs de la terre et de l'agroalimentaire. Lorsqu'on achète un produit, on doit savoir s'il rémunère correctement tous ceux qui ont travaillé à son élaboration.

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