Ce site présente les travaux des députés de la précédente législature.
NosDéputés.fr reviendra d'ici quelques mois avec une nouvelle version pour les députés élus en 2024.

Intervention de Stéphane Lenormand

Réunion du lundi 30 octobre 2023 à 17h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaStéphane Lenormand :

J'entends souvent que les outre-mer sont une chance et un véritable atout pour la République. Si notre groupe souscrit à cette vision, il tient à rappeler que cette chance vous oblige et nous oblige.

En septembre, vous annonciez une progression significative des crédits en faveur de l'outre-mer, signe d'une volonté forte du Gouvernement. Mais ce budget est au mieux stable si l'on prend en compte l'inflation – ce qui peut sembler louable compte tenu du contexte budgétaire.

S'il ne faut pas tomber dans la caricature, il faut aussi reconnaître que depuis des années la réalité quotidienne des territoires ultramarins est bien éloignée de celle de l'Hexagone. Outre-mer, les promesses d'égalité réelle et de fraternité ne sont pas tenues. La grande pauvreté est par exemple cinq à dix fois plus élevée que dans l'Hexagone en raison de salaires bas et de la cherté de la vie. C'est aussi le résultat d'un manque de volonté politique pour réduire les écarts qui se creusent.

Chaque année, nous attendons une révolution budgétaire et politique qui ne vient pas.

Prenons, par exemple, la question de l'habitat. On compte 70 000 logements précaires ou indignes dans les cinq départements d'outre-mer. Ils représentent à eux seuls 13 % des logements insalubres en France pour seulement 4 % de la population. La ligne budgétaire unique a été augmentée cette année, mais elle devra l'être encore pendant de nombreuses années pour rattraper le retard.

Ce texte entend aussi accompagner la mobilité des Ultramarins, notamment en élargissant le nombre des bénéficiaires de la continuité territoriale. Enfin ! Il s'agissait d'une proposition que notre groupe avait inscrite lors de sa journée réservée.

L'accès à l'eau devrait aussi être une priorité. Comme vous le savez, c'est un sujet qui est cher à ma collègue Estelle Youssouffa à Mayotte, mais aussi à Olivier Serva et Max Mathiasin en Guadeloupe. Le PLF prévoit de soutenir le syndicat mixte de gestion et d'assainissement des eaux de la Guadeloupe, avec une dotation de 20 millions. Nous estimons qu'il faut aller plus loin et nous demandons que les factures des Guadeloupéens et des Mahorais soient prises en charge en cas de coupure d'eau.

La majorité mettra en avant une hausse des crédits dédiés à la mission. Nous autres ultramarins savons qu'elle masque des années de sous-investissement – dont vous n'êtes pas le seul responsable, monsieur le ministre délégué. D'ailleurs, le déficit d'ingénierie que vous avez mentionné aboutira sans doute à une sous-consommation des crédits et retardera le développement des projets sur nos territoires. Il faut essayer d'y remédier.

Si beaucoup d'amendements ont été adoptés par la commission des finances, cela n'effacera pas le fait que le Gouvernement va recourir au 49.3 – avec le risque que la défiance s'installe dans les outre-mer.

Je relèverai à cet égard quelques exemples qui concernent mon département.

Un amendement prévoyait de répartir différemment les crédits destinés à préserver la biodiversité, sans les augmenter. Cela a été refusé.

Les moyens retracés dans le prochain contrat de plan État-région concernant Saint-Pierre-et-Miquelon baisseront par rapport au précédent.

J'ai présenté trois amendements qui ont franchi le cap de la commission des finances. L'un concerne les infrastructures portuaires, qui sont délabrées et qui relèvent de la compétence de l'État. J'en ai aussi déposé un au sujet de la déconstruction d'un ancien hôpital, qui bloque des projets de revitalisation du centre-ville et la construction d'un Ehpad. Enfin, l'un de mes amendements portait sur la nécessaire transition énergétique. Je rappelle qu'à Saint-Pierre-et-Miquelon presque 40 % du budget des familles est consacré au chauffage.

Je crains que, comme l'an passé, tout cela soit gommé par le 49.3, ce qui créera une nouvelle frustration. Mais, optimiste de nature, je terminerai sur deux aspects positifs.

Il nous reste un ministre doté d'une grande expérience d'élu local et qui nous a annoncé qu'il travaillerait mieux le budget de 2025, ainsi qu'un préfet qui a su installer une bonne entente dans le travail avec les élus locaux à Saint-Pierre-et-Miquelon. Vous me direz que c'est bien insuffisant eu égard aux défis que nous avons à relever, monsieur le ministre délégué. Mais je crois que c'est quand même un préalable.

Notre groupe est prêt à travailler avec vous si vous êtes d'accord pour retrousser vos manches sans tomber dans les grand-messes qui ont caractérisé le premier quinquennat. Nous avons besoin de pragmatisme outre-mer. Un problème, une solution – et ces solutions doivent être construites territoire par territoire.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.