D'un point de vue comptable, la mission Outre-mer affiche fièrement une augmentation de ses crédits. Je salue l'honnêteté dont vous avez fait preuve, monsieur le ministre délégué, en la corrigeant de l'inflation : elle ressort ainsi à 4,4 % en autorisations d'engagement et à 2 % en crédits de paiement. Bravo. J'ose pourtant dire qu'à l'image de ce budget, l'État manque cruellement d'ambition pour nos territoires. Le programme 123, Conditions de vie outre-mer, est un exemple particulièrement éloquent de ces chiffres en trompe-l'œil, en particulier l'action 01, Logement. La LBU a certes augmenté, passant à 291 millions d'euros, mais rappelons-nous qu'elle s'établissait à 289 millions d'euros en 2010 : il y a de quoi tempérer l'euphorie, alors même que l'inflation est galopante, que 13 % du parc de logements est insalubre, que 600 000 personnes sont mal logées, que les plans logement outre-mer n'ont jamais atteint leurs objectifs, que 100 000 logements sociaux font défaut et que d'innombrables logements ne répondent pas aux normes antisismiques.
Ce que nous voulons, pour en finir avec la pénurie de logements sociaux, c'est un véritable plan pluriannuel doté de moyens financiers et d'une stratégie à la hauteur des enjeux. Ce que nous voulons, ce sont des dispositifs spécifiques et innovants, prenant en compte par exemple le coût du désamiantage des logements individuels et des bâtiments publics. Ce que nous voulons, c'est la création d'un véritable observatoire du logement qui soit à même de fournir des données fiables et d'évaluer objectivement les politiques publiques passées et futures. J'appelle d'ores et déjà votre attention – de manière un peu opportuniste, je l'avoue – sur la prochaine journée de niche du groupe La France insoumise. J'aurai en effet l'honneur de présenter une proposition de résolution portant sur la création d'une commission d'enquête parlementaire relative à la gestion par l'État des risques majeurs dans les outre-mer, et je comprendrais mal que la majorité n'accompagne pas cette initiative.
S'agissant du programme 138, Emploi outre-mer, le taux de chômage atteint jusqu'à 30 % dans les outre-mer pour les jeunes de 15 à 29 ans, soit, faut-il encore le rappeler, un taux deux fois supérieur à celui de l'Hexagone. Face à ce fléau qui accélère le départ massif des jeunes sans perspective d'épanouissement au pays, il importe d'adopter un certain nombre de mesures courageuses.
Il est vrai que les politiques menées pendant des décennies par les gouvernements successifs à travers le Bureau pour le développement des migrations dans les départements d'outre-mer (Bumidom) et Ladom ont favorisé une saignée démographique sans précédent, en laissant croire que pour trouver un emploi il suffisait non pas de traverser la rue, mais l'océan Atlantique.
Pour retenir ces jeunes, il faut réellement aider et accompagner les entreprises qui produisent localement. Monsieur le ministre délégué, comptez-vous répondre favorablement à la demande d'augmentation de la dotation du régime spécifique d'approvisionnement (RSA) formulée par les industriels ultramarins ? L'insuffisance de ces crédits est un facteur d'augmentation du coût de la vie, de détérioration de la compétitivité et de perte d'emplois dans un contexte de chômage endémique. Nos filières de production ne comprennent pas ce qui ressemble à un revirement de l'État, puisque le Président de la République s'était engagé fermement en faveur d'une compensation de 8 millions pour tous nos territoires.
Nous attendons une vision véritablement à long terme, qui permette d'ancrer profondément les conditions du développement économique et social dans nos territoires.