Monsieur le ministre, voilà quelques mois, vous vous félicitiez d'avoir obtenu un budget historique pour la justice et, au même moment, la Cour européenne des droits de l'homme condamnait une fois de plus la France pour ses conditions indignes de détention. Quelle image de la justice ce budget porte-t-il, quand on observe que la partie la plus importante de ses crédits est consacrée à l'administration pénitentiaire, au point de représenter sept fois ceux de l'accès aux droits et à la justice ! Cette vision du tout-carcéral fait écho à la logique du tout-répressif de votre collègue Darmanin.
Je vous le redis : plus on construit, plus on enferme. Vous auriez pu consacrer cette hausse de budget à l'embauche de Spip ou à la formation des surveillants pénitentiaires, au lieu de généraliser les caméras-piétons et d'introduire des caméras de vidéosurveillance – 5 milliards d'euros de dette pour une fuite en avant !
Voilà deux semaines, je me suis rendue à la maison d'arrêt de Lyon-Corbas, puis au centre pénitentiaire de Saint-Quentin Fallavier, où je suis entrée dans les cellules du quartier arrivants, censé respecter le principe de l'encellulement individuel, qui est susceptible de réduire l'intensité du choc carcéral : toutes ces cellules étaient surpeuplées. La maison d'arrêt de femmes de Lyon-Corbas était, elle aussi, surpeuplée – les surveillants m'ont même dit que, la semaine précédente, trois matelas avaient été rajoutés en urgence sur le sol.
Quand allez-vous mettre fin à votre politique coûteuse du tout-carcéral, inutile pour l'insertion et la lutte contre la récidive ? Quand cesserez-vous de jeter l'argent public par les fenêtres ? Quand ferez-vous adopter ce mécanisme de régulation carcérale que les professionnels de la justice réclament depuis des années et qui ne vient jamais ?