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Intervention de Jérémie Iordanoff

Réunion du mardi 24 octobre 2023 à 17h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJérémie Iordanoff :

Monsieur le garde des sceaux, je vous poserai quelques questions en attendant le recours au 49.3, qui ne nous donnera probablement pas le loisir de voter sur ces crédits.

Tout le monde a salué l'effort budgétaire. Rappelons tout de même le point de départ : nous avons 9 000 magistrats, alors qu'il en faudrait 22 000 pour tendre vers les standards européens. Idem pour les greffiers : nous en avons 34 pour 100 000 habitants, alors qu'il en faudrait 61 pour être dans la moyenne européenne. Notre justice de l'urgence n'écoute pas, mais chronomètre tout, ce qui conduit à une perte de sens pour les magistrats et l'ensemble des agents de la justice. Je ne suis pas certain que ce budget et la répartition des crédits que vous prévoyez permettront de régler la question.

Le taux d'occupation des prisons est de 120 % – et de 143 % pour les maisons d'arrêt. C'est, parmi les 47 pays du Conseil de l'Europe, le cinquième plus mauvais taux – et je passe sur les condamnations de la France. Notre administration pénitentiaire est délabrée. Il en résulte une forme de maltraitance du personnel, des justiciables et des détenus. Il faut apporter des réponses, mais nous ne sommes pas certains que les crédits prévus permettront de le faire.

La défense des plus vulnérables, qui doit être une priorité, n'est pas forcément au rendez-vous. Les crédits de l'aide juridictionnelle, par exemple, ne tiennent même pas compte de l'inflation.

Vous comptez diviser par deux les délais de jugement mais, au vu du nombre de magistrats qui arrivent dans les tribunaux, rien ne permet de penser qu'on y arrivera. Vous annoncez 327 magistrats supplémentaires en 2024, ce qui est loin des besoins recensés.

Les premiers référentiels établis par le groupe d'étude sur la charge de travail des magistrats démontrent que ces derniers devraient être entre deux fois et quatre fois plus nombreux pour certaines fonctions, comme l'instruction. Mon groupe avait expressément demandé que ces référentiels, pilotés par la DSJ – direction des services judiciaires –, servent de base pour la construction du budget, mais il n'en a rien été. Pire, les éléments ne sont pas diffusés : ils sont dans l'attente d'un contrôle de cohérence. Quand ces référentiels seront-ils publiés et à quoi serviront-ils ? Seront-ils utilisés pour calculer le nombre de magistrats nécessaires, ou simplement pour gérer la pénurie ?

L'indigence des moyens humains et matériels empêche d'apporter une réponse satisfaisante dans certaines matières, pourtant jugées prioritaires si l'on en croit votre dernière circulaire de politique pénale. Je pourrais prendre l'exemple de la justice pénale environnementale, qui manque cruellement d'assistants spécialisés au sein des pôles régionaux : à moyens constants, la justice ne peut plus lutter efficacement contre les atteintes à l'environnement. Je pourrais aussi évoquer la lutte contre les violences intrafamiliales : vous en faites une politique pénale prioritaire, mais la justice fonctionne là aussi à moyens constants, et des outils prometteurs ne sont pas suffisamment mobilisés, en particulier le contrôle judiciaire avec placement probatoire (CJPP). Les dix structures qui existent offrent seulement 165 places. Pourquoi ne pas augmenter leur nombre ? Il faudrait le tripler.

Les moyens pour la rénovation du parc pénitentiaire sont en baisse. Ils sont dix fois moins élevés que ceux alloués à la construction de nouvelles places de prison. Pouvez-vous nous parler, en particulier, de l'établissement de Varces ?

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