Les sondages montrent que les Français restent attachés à leur commune. Notre commune est une part de notre identité. Elle est souvent étroitement liée à notre histoire familiale et personnelle. C'est aussi, comme le disait Jacques Chirac, le lieu où les principes de notre République sont confrontés à l'épreuve des faits et des réalités. C'est la cellule de base de nos démocraties. Dans nos communes rurales, le personnage central qui se tient aux côtés des maires et des élus municipaux est la secrétaire de mairie. Pardon de féminiser ce métier, mais l'écrasante majorité étant des femmes, je me permets de parler d'elles.
Ces secrétaires de mairie n'ont de secrétaires que le nom. Elles gèrent les élections, l'état civil, l'urbanisme, la comptabilité, les réunions du conseil municipal, la communication, le cadastre, les concessions, le bulletin municipal, les fêtes et les cérémonies avec ce qu'elles impliquent comme déclarations et plans de sécurité, le respect du RGPD, les archives, le scolaire, les lampadaires qui tombent en panne, le remplacement d'un défibrillateur, la dératisation, l'horloge de l'église, la téléphonie, l'Insee et j'en passe. Elles sont, malgré elles, le réceptacle de toute la complexité administrative qui consiste à empiler des règles sans jamais en supprimer.
Si l'objet de cette proposition de loi n'est pas de régler le sujet de l'inflation normative, c'est tout de même un point à noter. Une tâche qui pouvait être accomplie en cinq minutes il y a dix ans requiert désormais des heures. Les secrétaires de mairie sont aussi les premières concernées par ce que la Première ministre a appelé, dans son récent discours devant le Conseil d'État, le manque de confiance de l'administration envers le terrain. De cela, il ne sera pas question dans cette proposition de loi, mais il était important de le mentionner. Parler de nos communes revient à évoquer de nombreux sujets qui méritent de faire bouger l'action publique. Je pense au statut de l'élu ou à la nécessaire réforme de la fonction publique. Ces sujets sont en bonne voie d'aboutir, mais même s'il est tentant de les aborder à travers cette proposition de loi, tenons-nous-en d'abord à son sujet stricto sensu malgré la frustration que cela peut générer.
Ce texte doit être vu comme le point de départ d'une réflexion sur la place et l'avenir des petites communes et des maires. Il introduit une politique de mérite et donne des perspectives. Le mérite permettra aux agents en catégorie C d'accéder plus facilement à la catégorie C en faisant valoir leur expérience, et à ceux qui le souhaitent de se former pour bénéficier d'une promotion interne pour exercer la fonction de secrétaire général de mairie dans un cadre d'emplois de catégorie B. Il réservera aussi une part minimale, pour les secrétaires de mairie, sur les listes d'aptitude de la fonction publique territoriale. Le mérite, c'est aussi l'avancement accéléré prévu par l'article 3, qui accordera aux secrétaires de mairie une rétribution supplémentaire. Les perspectives, quant à elles, concernent la formation d'entrée dans le métier, la meilleure organisation de l'animation territoriale, par le biais de l'article 2 bis A, et la demande d'un rapport gouvernemental consacré au projet de filière de formation propre à ce métier.
Cette proposition de loi nous paraît utile. Elle fait avancer la cause en mettant sur les rails un vaste projet de revalorisation du métier et en témoignant de l'attention accrue de la représentation nationale à destination des petites communes. Pour mémoire, plus de 70 % des communes comptent moins de 1 000 habitants. Avec la revalorisation du métier de secrétaire de mairie, c'est aussi l'avenir de nos communes qui est en jeu. On ne peut pas se tourner sans cesse vers les maires et les secrétaires de mairie pour leur confier des responsabilités sans leur donner les moyens de les exercer. Cette proposition de loi permet de poser des jalons et d'entamer un processus de revalorisation du métier tout en évitant l'écueil qui consiste, bien souvent, à imposer de façon uniforme des pratiques, quitte à détruire l'équilibre existant dans certains territoires.
Nous voterons en faveur de cette proposition de loi, tout en souhaitant que se poursuive la relation de confiance entre l'État et nos communes.