Les crédits de la mission Sécurités sont globalement à la hausse et c'est plutôt une bonne nouvelle, mais chacun sait que le diable est dans les détails. Je pense notamment au recul des moyens de l'administration territoriale de l'État, qui semble traduire un recul de la présence de l'État dans les territoires, à la baisse des moyens accordés à l'action numérique du ministère de l'intérieur, qui entre en contradiction avec les engagements de modernisation pris dans la Lopmi, ou encore à la baisse des moyens accordés au fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD). Ce dernier point apparaît vraiment comme une anomalie : à l'heure où la France est encore endeuillée, la prévention de la délinquance et de la radicalisation devraient être, plus que jamais, une priorité.
Les rapports entre la police et la population sont souvent questionnés. Un nombre croissant d'agents de police expriment leur colère en dehors des syndicats pour faire voir la réalité du terrain – une réalité qui devient un enjeu social, quand on sait qu'il y a eu plus de 1 000 suicides dans la police au cours des vingt dernières années. Les 122 psychologues sont bien peu, par rapport aux 150 000 agents en service ; le dispositif « sentinelles » est peu efficace, car on y est régulièrement nommé volontaire d'office ; enfin, le programme de mobilisation contre le suicide manque de moyens pour être efficace, avec 2,9 millions seulement dans le PLF pour 2024. Il y a certes une formation à distance, intitulée « Agir pour prévenir le suicide et ses conséquences », mais le fait que les crédits dédiés à la formation passent de 43 à 29 millions malgré le recrutement annoncé de milliers de nouveaux agents n'invite pas à l'optimisme. Nous avons déposé des amendements demandant de véritables moyens de lutte contre le suicide. Malheureusement, le 49.3 va, une fois encore, balayer ces propositions avant même que le débat puisse avoir lieu. Il vous reste cependant la possibilité de soutenir ces propositions ou, au moins, d'en discuter avec nous.
La sécurité civile est elle aussi en première ligne avec le réchauffement climatique qui augmente à la fois le risque d'incendie et l'intensité des feux. Il faut des moyens à la hauteur de ce qui constitue l'enjeu du siècle. Or l'IGA nous alerte sur le risque de rupture capacitaire. Nous proposons donc d'accompagner l'action en la matière avec un fonds d'investissement national.
Cela permettrait d'abord de renforcer les moyens humains, avec des recrutements massifs, de l'ordre de 40 000 personnes d'ici 2035, et un objectif de 50 % de professionnels d'ici 2040. Il faut valoriser leur travail, avec le retour de l'âge légal de départ à la retraite à 55 ans et une retraite anticipée pour les volontaires quand ils ont de l'ancienneté. Il faut, enfin, généraliser la formation aux feux de forêt, qui doit être intégrée au tronc commun.
Quant aux moyens matériels, vous prévoyez d'acquérir 1 100 nouveaux camions-citernes feux de forêts, ce qui portera leur nombre à 100 000 : nous ne ferons ainsi que revenir au niveau de 2005. Pour faire face à l'enjeu du siècle, nous proposons un objectif de 6 000 camions-citernes feux de forêts d'ici à 2030. Par ailleurs, vos investissements dans les moyens aériens sont très insuffisants. Il faut investir dans plus d'appareils, et qui ne nécessitent pas d'aller s'entraîner au Canada.
Enfin, il convient de réfléchir collectivement à la question des modes de financement. Nous aurons l'occasion de reparler de la TSCA, ou de la contribution additionnelle à la taxe de séjour que recommande notamment notre collègue Florian Chauche.