Je vous présente les crédits du ministère de l'intérieur et des outre-mer pour 2024 dans un contexte très difficile. Jamais les Français et les Européens n'ont eu autant besoin de sécurité. Derrière les données budgétaires et les aspects techniques, voire technocratiques de la discussion, ce sont des femmes et des hommes qui concourent à maintenir la paix publique, dans des conditions difficiles – policiers, gendarmes, agents de la direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), agents de préfecture, personnels de la sécurité civile et tous ceux qui sont au ministère de l'intérieur. Le soutien que leur apportent les programmes budgétaires n'est rien par rapport au soutien politique que nous leur témoignons.
Grâce aux parlementaires, l'année 2023 aura été marquée par l'adoption de la loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur (Lopmi). Pour la première fois, une loi de programmation vise l'ensemble du ministère de l'intérieur, et non pas simplement la sécurité intérieure. Elle consacre 15 milliards d'euros sur cinq ans à la sécurité des Français. Puisqu'il y a eu des débats politiques et médiatiques sur la question de savoir si cette loi serait respectée, je le redis : non seulement elle l'est à l'euro près, mais la communication des plafonds a fait état de 200 millions supplémentaires, pour le seul volet de l'intérieur.
Non seulement les crédits votés par les parlementaires ont été respectés, malgré l'inflation et les difficultés économiques et budgétaires, mais il y a même des crédits supplémentaires. Ils doivent être exécutés conformément à la trajectoire que vous avez votée. Si des arbitrages internes sont évidemment à prévoir, compte tenu de l'inflation et de la revalorisation du point d'indice, les priorités restent inchangées : le renforcement de la présence des forces de sécurité intérieure, avec notamment le doublement de la présence sur la voie publique – un engagement du Président de la République en 2022 ; le raffermissement de l'administration territoriale ; la lutte contre le terrorisme ; et la préparation des Jeux olympiques et paralympiques (JOP).
Les crédits constatés sur l'année 2023 sont conformes aux engagements. Ainsi, l'accueil de la Coupe du monde de rugby – le cinquième plus grand événement mondial – se déroule, jusqu'à présent, dans les meilleures conditions de sécurité possibles, sur le terrain mais surtout en dehors.
Un effort sans précédent a été fait pour renforcer la présence des forces de l'ordre. Elle a notamment doublé sur la voie publique, ce qui est passé par le recrutement de personnels supplémentaires de police et de gendarmerie. Dix escadrons de gendarmerie mobile et unités de CRS ont déjà été créés sur les onze prévus, avec des sorties d'école particulières. Les circonscriptions de police prioritaires ont reçu le renfort de 1 266 policiers.
Je salue également la création, en concertation avec les élus, de 239 brigades de gendarmerie, alors que le Président de la République en avait annoncé 200 : tout augmente ! Les premières sorties d'écoles ont eu lieu et dès le mois de juin, les nouvelles recrues étaient disponibles pour renforcer la sécurité dans nos campagnes et dans le monde périurbain.
Le matériel n'est pas en reste. Lors de mes deux premières années au ministère de l'intérieur, j'ai obtenu un plan de relance qui a permis d'équiper les policiers et les gendarmes notamment en voitures ou matériel d'intervention, mais aussi en matière immobilière. Les équipements des forces de l'ordre continuent à être renforcés : 4 800 véhicules pour la police et pour la gendarmerie ont été acquis en 2023, venant s'ajouter aux 13 310 véhicules déjà achetés. Nous aurons ainsi renouvelé 70 % du parc automobile du ministère de l'intérieur. En 2024, nous acquerrons, pour 130 millions, 3 600 nouveaux véhicules, dont 58 véhicules Centaure chers à nos amis gendarmes. Nous avons également finalisé le plan caméras-piétons : le 1er janvier 2024, tous les policiers et gendarmes présents sur la voie publique et en contact avec la population en seront équipés.
Conformément aux annonces du Président de la République, le Gouvernement déposera un amendement pour renforcer les moyens de la sécurité civile pour lutter contre les feux de forêt, à hauteur de 140 millions en crédits de paiement. Cela comprend les 45 millions destinés à la création de la quatrième unité d'instruction et d'intervention de la sécurité civile, qui s'installera à Libourne. Sont prévus le recrutement de 163 personnels supplémentaires ainsi que 40 millions pour aider les services départementaux d'incendie et de secours (Sdis) à acheter des véhicules de sapeurs-pompiers, 32 millions pour renouveler notre flotte de Canadair et 23 millions pour louer des moyens aériens. Je note que, si l'année 2023 a connu beaucoup de départs de feux, elle a aussi vu beaucoup moins d'incendies, grâce à l'organisation et au travail collectif de la sécurité civile et au courage de nos sapeurs-pompiers.
L'année 2023 est aussi marquée par l'acquisition de 40 hélicoptères, pour 500 millions d'euros, par un travail de mutualisation entre la sécurité civile et la gendarmerie nationale et par des ressources supplémentaires inédites pour répondre à la cybercriminalité. C'est le début de la réponse à votre demande de créer 1 500 cyberpatrouilleurs et un numéro d'appel « 17 Cyber ». Des moyens importants sont encore déployés pour la population, comme en témoigne le succès des plateformes Pharos et Thesee, mais aussi le déploiement du portail Ma sécurité et bientôt la généralisation de la visioplainte que vous avez autorisée dans la Lopmi.
Les moyens dédiés aux services de renseignement du ministère de l'intérieur augmentent de manière inédite. Il y a dix ans, lors de la création de la DGSI, on comptait un peu plus de 3 200 agents. Grâce à l'action du Président de la République, le nombre a quasiment doublé : 5 500 personnels emménageront dans le futur site unique à Saint-Ouen-sur-Seine, un projet figurant dans la Lopmi pour 1,2 milliard d'euros. La DGSI aura donc vu son budget et ses effectifs doubler, d'où son efficacité. J'en profite pour saluer son travail et le courage de ses agents.
Un effort sans précédent est également fait pour l'outre-mer, dont je n'évoquerai que les crédits en matière de sécurité, le reste vous sera présenté par le ministre délégué chargé des outre-mer. Ces crédits visent à répondre aux enjeux de sécurité et de lutte contre les stupéfiants – notamment en Guyane –, de lutte contre les trafics illicites – notamment aux Antilles, surtout en Martinique – et de lutte contre l'immigration irrégulière – en particulier à Mayotte, où l'effort a été très important et se poursuivra. Depuis 2017, 1 400 policiers et gendarmes supplémentaires ont été affectés dans nos territoires ultramarins, soit une augmentation de 30 %. Elle est sensible singulièrement à Mayotte, où les effectifs ont presque doublé, pour un total de 1 150 sans compter les escadrons de gendarmerie mobile, et en Guyane, où l'on compte 1 525 forces de l'ordre hors escadrons de gendarmerie mobile.
Si l'opération Wuambushu a montré l'efficacité de la lutte menée contre l'insécurité, il y a encore du travail à Mayotte. Il faut sans doute revoir le plan Shikandra. À cet égard, j'ai fait des propositions à la Première ministre et au Président de la République. Il faut aussi revoir l'opération Harpie avec le ministre des armées, concernant la lutte contre l'orpaillage illégal dans la forêt amazonienne française.
Ces augmentations d'effectifs territoriaux s'accompagnent par ailleurs de renforts permanents : 21 escadrons de gendarmerie mobile sont répartis dans l'ensemble des outre-mer. De façon générale, grâce au retour aux quatre sections des unités de CRS ainsi qu'aux nouvelles unités que vous nous avez accordées, 176 escadrons de gendarmerie mobile ou unités de CRS ont été mobilisés pendant la Coupe du monde de rugby, qui nous ont permis de faire face en même temps à la venue du roi et de la reine d'Angleterre et à celle du pape à Marseille lors d'une semaine marquée par des menaces terroristes.
Parallèlement, le réarmement de l'administration générale et territoriale de l'État – les préfectures – se poursuit. Les capacités numériques et cyber sont renforcées. Le programme réseau radio du futur (RRF) est une magnifique invention française, que nous pourrons exporter. Les forces ont déjà commencé à l'utiliser dans sa version bêta, montrant ainsi son efficacité, et son opérateur, l'Agence des communications mobiles opérationnelles de sécurité et de secours (Acmoss), est désormais installé. L'administration numérique pour les étrangers en France (Anef) œuvre à la dématérialisation de bout en bout des démarches des étrangers en France. Le futur projet de loi sur l'immigration assurera sa cohérence avec la réforme des préfectures, mais aussi avec l'application France Identité. Grâce à cette dernière, chacun peut commencer à avoir une identité numérique aux usages divers – pièce d'identité, permis de conduire, vote dématérialisé. Ces projets de transformation numérique sont à la hauteur de celui du prélèvement de l'impôt à la source que je vous avais présenté dans mes fonctions antérieures de ministre de l'action et des comptes publics.
Le numérique a donc été consolidé au sein du ministère, qui connaissait une dette numérique extrêmement importante. Une hausse très significative des crédits est prévue en 2024, pour 634 millions en autorisations d'engagement et déjà 176 millions en crédits de paiement. Nous recrutons les 75 premiers équivalents temps plein (ETP) dédiés à l'Agence du numérique, créée conformément à la Lopmi.
La période se caractérise par 350 emplois pour l'État territorial – les préfectures –, par des moyens pour la vidéoprotection – 25 millions en 2024, contre 22 millions en 2023 – et par la finalisation de la création de nouvelles sous-préfectures, en outre mer ou sur le territoire métropolitain, ce qui ne s'est pas produit depuis plus de quarante ans et permettra de rapprocher nos concitoyens de l'État territorial.
Enfin, l'année 2023 a permis de régler, notamment grâce à la mobilisation de la ministre déléguée Dominique Faure, la question de la délivrance des titres d'identité et de voyage : 15 millions, puis 48 millions ont été affectés aux collectivités locales et aux préfectures afin de résoudre les difficultés de fonctionnement de ce service public, qui étaient inacceptables pour les Français. Le délai d'obtention d'un rendez-vous en mairie est désormais de dix-neuf jours, contre soixante-dix-sept il y a un an et demi.
Le ministère se projette également vers les événements de 2024. Outre les dates habituelles, comme les commémorations des débarquements de Normandie ou de Provence, l'événement majeur, qu'il s'agisse d'organisation, de lutte contre le terrorisme ou de plans anti-délinquance, sera bien sûr celui des Jeux olympiques et paralympiques. On compte 30 sites, 206 nations, 32 sports, 329 épreuves, 31 500 volontaires – qu'il faut passer au fichier –, 26 000 journalistes accrédités et plus de 10 millions de spectateurs cumulés attendus, certes en Île-de-France mais aussi à Châteauroux, à Marseille ou à Tahiti – pour les épreuves de surf, une discipline née d'ailleurs en Polynésie française et non à Hawaï. Près de 35 000 forces de l'ordre seront engagées du 26 juillet au 8 septembre 2024 pour accueillir ces événements. À ce jour, le surcoût prévisionnel lié aux Jeux s'élève à 200 millions d'euros pour le ministère de l'intérieur, même s'il conviendra de préciser le chiffre a posteriori. Le dispositif mis en place est d'envergure et sans équivalent au ministère l'intérieur.
Enfin, le programme 207 Sécurité et éducation routières, qui dépend du ministère de l'intérieur, connaît aussi une hausse inédite de ses crédits – 35 millions supplémentaires en crédits de paiement – afin notamment de lutter contre la conduite sous stupéfiants.