Durant l'examen du projet de loi, nous avons exprimé notre volonté de protéger nos concitoyens au sein de l'espace numérique. Pourtant, d'emblée, nous avons pointé les mauvaises conditions d'examen de ce texte. Rappelons que le Conseil d'État a averti que ces circonstances n'étaient pas « de nature à permettre de garantir pleinement la sécurité juridique » de ce projet de loi.
Sur le fond, la lutte contre l'accès des mineurs à la pornographie est un combat que nous partageons. Le non-respect de la loi par cette industrie, qui se caractérise par des violences sexuelles, n'a que trop duré. Rappelons ce qu'est l'industrie de la pornographie : 90 % des vidéos pornographiques relèvent du code pénal, selon la procureure de la République de Paris ; en effet, elles peuvent comporter des scènes ultraviolentes ou de viols, ou un contenu à caractère raciste. Le texte comporte des avancées que nous saluons, telles la possibilité pour les personnes filmées de demander le retrait des vidéos.
Cependant, la prévention est incontournable. L'un des piliers de cette prévention, ce sont les cours d'éducation sexuelle et affective, honnis par certains députés de la droite. Or seules 15 % de ces séances sont dispensées à l'école et au lycée, et moins de 20 % au collège. Nous devons multiplier ces séances, dont une partie doit spécifiquement être consacrée à la pornographie et aux fausses représentations qu'elle diffuse.
Pour ce qui est de la protection contre les arnaques, l'outrage et la désinformation en ligne, nous ne sommes pas convaincus par le dispositif proposé.
S'agissant des filtres antiarnaque, nous nous opposons à la possibilité pour une autorité administrative d'imposer le blocage de l'accès à un service de communication en ligne, en raison des risques importants en matière d'exercice des libertés individuelles. Le blocage de sites ne devrait être autorisé que par un juge judiciaire, afin de vérifier que la demande n'est ni erronée ni abusive au regard des libertés fondamentales.
S'agissant de la peine de bannissement des réseaux sociaux, la généralisation du contrôle d'identité en ligne risque de porter atteinte à la liberté d'expression. Alors que nous avions restreint la liste des délits pour lesquels une peine complémentaire peut être proposée, nous déplorons l'adoption d'amendements de la majorité, visant à étendre le champ d'application de la peine complémentaire aux provocations directes et publiques à commettre certaines infractions graves contre les personnes et les biens. Il s'agit clairement d'appliquer le dispositif à des événements politiques, faisant écho aux propos du président, qui souhaite limiter voire supprimer l'accès aux réseaux sociaux lors des violences urbaines. Cependant, nous sommes satisfaits de l'adoption de notre amendement visant à supprimer l'extension de l'amende forfaitaire délictuelle à certaines infractions du droit de la presse commises en ligne.
S'agissant du cloud, nous ne croyons pas que plus de concurrence ou plus de transparence suffiront à favoriser le développement d'un marché du cloud souverain. La stratégie que vous défendez repose sur la conviction que la France et certains acteurs européens ne sont et ne seront pas en mesure demain de rattraper le retard accumulé en matière de qualité du service et de sécurité, par rapport aux grands acteurs américains du secteur. Eu égard à la gravité de l'enjeu que représente la sécurité des données, il est indispensable de nous donner les moyens de favoriser l'émergence d'acteurs publics et de bâtir un cloud souverain à même, d'une part, de réguler les stockages, l'utilisation et le traitement des données, d'autre part, de garantir l'autonomie stratégique dans la disponibilité du système.
Enfin, la légalisation des Jonum ouvre une boîte de Pandore comportant des risques multiples. Alors que notre pays compte 1,4 million de joueurs à risques, dont 400 000 joueurs pathologiques, nous autoriserons un nouveau type de jeu qui s'apparente à un jeu d'argent et de hasard. Les risques sont énormes. Finalement, il s'agit de développer un nouveau marché alors qu'il est déjà saturé de jeux d'argent et de paris sportifs.